La diffusion en direct a été orchestrée par Pierre Bouvier, Romain Del Bello, Charlotte Herzog, Jean-Philippe Lefief, Marie Pouzadoux, Marie Slavicek, Louise Vallée et Cécile Bouanchaud. Consultez tous nos articles, analyses détaillées et reportages approfondis sur le conflit ukrainien. Le «Monde» offre des analyses, des reportages et des explications détaillées. La Suisse organise une conférence pour « inspirer un futur processus de paix » en Ukraine. Les violations commises en Ukraine : « Les délinquants prétendent souvent que c’est pour que les victimes ne puissent pas avoir d’enfants ». Les pays du G7 ont convenu de renforcer le soutien à l’Ukraine grâce aux actifs russes gelés.
Vadym Tcherni, un officier ukrainien, affirme : « Pour tenir le front, nous avons besoin de plus de soldats ». Ensuite, il y a Bidzina Ivanichvili, la « marionnette de Poutine » qui a fait basculer la Géorgie. Comment les Mirage 2000-5 promis par Emmanuel Macron pourraient-ils être bénéfiques pour l’armée ukrainienne ? Les lettres d’Olga et de Sasha : « C’est triste à dire, mais j’ai l’impression que l’Ukraine doit ne dépendre que d’elle-même ». Nous répondons à vos questions les plus courantes.
Comment les drones sont-ils utilisés par Moscou et Kiev ? Depuis quelques mois, une guerre intense de drones a éclaté entre la Russie et l’Ukraine, atteignant des niveaux sans précédent. Selon un rapport publié en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé en défense, les Ukrainiens perdent environ 10 000 drones par mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 par jour. En comparaison, l’armée française ne possède qu’une flotte de 3 000 drones.
Les Ukrainiens et les Russes se servent majoritairement de petits drones non armés, d’origine civile, peu coûteux et disponibles en quantité. Ces drones sont utilisés pour surveiller le champ de bataille, diriger les soldats ou les tirs d’artillerie. Certains sont même adaptés pour pouvoir transporter de légères charges explosives, qui sont ensuite lâchées sur les tranchées ou les véhicules blindés.
Les drones kamikazes, bien que moins fréquents, ont aussi un rôle crucial. Ces UAV, équipés d’explosifs, sont envoyés au-dessus des lignes de front sans mission préalablement définie. Le Kremlin fait usage des drones russes Lancet-3, ainsi que des Shahed-136, de fabrication iranienne. Manquant de flotte de guerre, l’Ukraine répond à l’ennemi en utilisant des engins navals non pilotés, de petits kayaks télécommandés et chargés d’explosifs (450 kilos de TNT).
Preuve de l’importance des drones dans leurs manoeuvres, Ukrainiens et Russes ont mis en place des systèmes d’approvisionnement pour leurs troupes sur la durée, en achetant en grande quantité des drones civils sur le marché, mais aussi en développant leur propre capacité de production. L’industrie nationale ukrainienne, encore au stade embryonnaire au commencement de la guerre du Donbass il y a dix ans, a depuis progressé en force. À la fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a déclaré qu’une réplique du drone russe Lancet avait été réalisée et serait bientôt mise en service sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.
En raison des sanctions imposées par l’Occident, qui restreignent son approvisionnement en pièces électroniques, la Russie est mise à mal. Cependant, d’après les agences de renseignement américaines, les autorités russes auraient débuté la construction d’une usine à Alabouga, une zone économique spéciale, dans le but de produire des drones-kamikazes fabriqués selon un modèle iranien, à l’image des Shahed-136.
Qu’en est-il du stock d’armes russes ?
Estimer l’ampleur actuelle de l’appareil de missile militaire russe s’avère particulièrement compliqué, voire impossible. Les agences de renseignement ukrainiennes fournissent fréquemment des informations à ce sujet, cependant, leurs évaluations peuvent être mises en doute.
D’après Andri Ioussov, porte-parole du GUR, le service central d’intelligence du ministère de la défense cité par Liga.net, l’armée russe possédait environ 2300 missiles balistiques ou de croisière avant le début du conflit et en comptait plus de 900 en début d’année. Selon le porte-parole, ce nombre inclurait en outre plusieurs milliers de missiles antiaériens S-300, pouvant atteindre une distance d’environ 120 kilomètres, et une grande quantité de S-400, un modèle plus récent à la portée triplée. En août, Vadym Skibitsky, vice-directeur du GUR, estimait le nombre de missiles pouvant atteindre plus de 500 kilomètres à 585.
En ce qui concerne les capacités de production, des experts estiment qu’elles s’élèveraient à une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois. En octobre, la production était évaluée à 115 unités par le GUR.
En plus d’acquérir des missiles à courte portée en Iran et en Corée du Nord, la Russie est en train de renforcer ses stocks. D’après un rapport de Reuters basé sur diverses sources iraniennes, la Russie a reçu depuis janvier environ 400 missiles iraniens Fateh-110 dont la portée est de 300 à 700 kilomètres. Cela fait suite à un accord conclu à cette période. Le nombre exact de missiles nord-coréens qu’elle a obtenus reste inconnu, mais 24 d’entre eux ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, d’après Andriy Kostin, le procureur général. Selon les experts ayant étudié les décombres et les trajectoires, ces missiles pourraient être des KN-23 et KN-24 avec une portée d’environ 400 kilomètres.
Qu’en est-il des avions de combat F-16 ?
En août 2023, les États-Unis ont accédé à la demande du président ukrainien de transférer des avions de combat F-16 à l’Ukraine, une requête de longue date. Alors qu’il existe plus de 300 F-16 répartis entre neuf pays européens, y compris la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, tous les États possédant ces avions ne peuvent pas s’en séparer de manière instantanée.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a mentionné que 42 F-16 étaient promis par l’Occident à Kiev, mais cette information n’a pas été validée. La première ministre danoise, Mette Frederiksen, a affirmé que le Danemark avait promis 19 avions. Les six premiers ne seraient pas livrés avant fin 2023, huit supplémentaires en 2024 et cinq en 2025. Les Pays-Bas, qui ont également fait une promesse, possèdent 42 de ces avions mais n’ont pas indiqué combien ils envisagent de transférer.
Il faut que les pilotes ukrainiens reçoivent une formation pour gérer ces avions de guerre américains. Il y a onze pays qui se sont engagés à s’occuper de l’entraînement des pilotes, des alliés de l’Ukraine. Selon l’OTAN, ce ne sera qu’au début de l’année 2024 que les soldats ukrainiens pourront exploiter ces avions dans un contexte de combat bien que d’autres experts pointent vers l’été de cette même année.
Quel type d’aide militaire est offert à l’Ukraine par ses alliés ?
Deux années après le commencement de la guerre à large échelle, l’appui occidental à Kiev est en décroissance: les engagements d’aide nouvellement pris ont diminué au cours de la période d’août 2023 à janvier 2024 comparativement à la même phase de l’année précédente, d’après le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en février 2024. Cette trajectoire décroissante pourrait se maintenir, avec le Sénat américain ayant du mal à passer des lois pour des aides et l’Union Européenne (UE) luttant pour obtenir l’adoption d’une aide de 50 milliards le 1er février 2024 en raison de l’opposition hongroise. Il est à noter que ces deux paquets d’aide ne sont pas encore inclus dans le dernier rapport de l’Institut Kiel, qui s’arrête en janvier 2024.
Les chiffres de l’institut allemand indiquent une diminution et une concentration du nombre de donateurs autour d’un groupe central de pays: les États-Unis, l’Allemagne, les nations du nord et de l’est de l’Europe qui offrent à la fois une aide financière importante ainsi que des armements de pointe. Depuis février 2022, en ajoutant tout ensemble, les pays soutenant Kiev se sont engagés pour un soutien militaire, financier ou humanitaire totalisant au moins 276 milliards d’euros.
D’après les chiffres absolus, les nations prospères ont été les plus généreuses. Les États-Unis arrivent en tête des donateurs avec un engagement de plus de 75 milliards d’euros, dont 46,3 milliards destinés à l’assistance militaire. L’Union européenne, quant à elle, a annoncé à la fois des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides collectives provenant des fonds de l’UE (93,25 milliards d’euros), portant le total à 158,1 milliards d’euros.
Cependant, si l’on considère ces contributions en proportion du produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, l’ordre change. Les États-Unis tombent alors au vingtième rang avec 0,32 % de leur PIB dédié aux dons, soit bien après des pays limitrophes de l’Ukraine ou d’anciennes républiques soviétiques amicales. L’Estonie arrive en tête avec 3,55 % de son PIB dédié aux dons, suivie par le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %). La Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %) complètent le top 5. Les trois pays baltes, qui partagent tous des frontières avec la Russie ou son allié, la Biélorussie, figurent parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.
Concernant le classement du pourcentage du PIB, la France est vingt-septième, ayant attribué 0,07 % de son PIB, immédiatement derrière la Grèce (0,09 %). L’effort de soutien de la France a régulièrement diminué depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. En avril 2023, la France était au vingt-quatrième rang, et au treizième à l’été 2022.
Et que pouvons-nous dire des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne?
Les relations tendues entre l’Ukraine et la Pologne se prolongent depuis plusieurs mois, principalement à cause du transit de céréales. Au printemps 2022, l’Union européenne a facilité l’exportation de produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient en créant des « voies de solidarité ». Cela a permis aux produits ukrainiens d’éviter les droits de douane. Cependant, environ la moitié des céréales ukrainiennes se retrouvent dans l’UE, d’après les informations de la Fondation Farm. Ces céréales sont généralement plus abordables que le blé cultivé dans l’UE, et cela est particulièrement remarqué dans les pays d’Europe centrale.
Au nom de la protection de leur marché local et des revenus de leurs agriculteurs, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont décidé de bloquer toutes les importations de céréales ukrainiennes en avril 2023. Cet embargo a été accepté par Bruxelles pour une durée limitée à quatre mois et en veillant à ce que cela n’entrave pas le transit vers d’autres pays. Toutefois, estimant que le problème sous-jacent n’était pas résolu, la Pologne a refusé de rouvrir ses frontières à la fin de l’été malgré Bruxelles qui estime que l’embargo n’était plus justifié. Bruxelles explique cette décision en affirmant que ses enquêtes n’ont pas montré de distorsion des marchés nationaux pour les céréales.
Les fermiers de Pologne ont établi un blocus à la frontière avec l’Ukraine dans le but de freiner l’entrée des camions ukrainiens sur leur sol national. Ces manifestants demandent un « embargo intégral » sur les marchandises agricoles et nourritures provenant d’Ukraine. Ils protestent contre l’augmentation significative de leurs frais de production tandis que les prix sont à leur niveau le plus bas et que les silos et dépôts sont pleinement remplis. Le chef d’État ukrainien a mis en avant en 2024 que le siège de la frontière polonaise manifeste « l’affaiblissement de la solidarité » en faveur de son pays, et a demandé des discussions avec la Pologne. « Seule la Russie se complait » dans ces conflits, a-t-il également dit, fustigeant « l’émergence de slogans explicitement pro-Poutine ».