La tranquillité règne dans la rue. Aucune marque de mode n’est visible. Pour rencontrer Grace Wales Bonner, on doit frapper à la porte d’une petite maison, nichée au cœur de Londres, à la rive gauche de la Tamise, dans le quartier connu sous le nom de De Beauvoir Town. Ce quartier est célèbre pour ses magnifiques propriétés et ses rues bordées d’arbres. Ceux qui y résident le qualifient de village.
La conceptrice a son atelier au premier étage d’un ancien bâtiment du XIXème siècle qui servait autrefois de manufacture de chapeaux et jusqu’en 2021, été une galerie d’exposition de meubles de l’époque des Arts et Crafts. Grace Wales Bonner s’approche, vêtue de jeans blancs et un pull noir, ses cheveux attachés en chignon, l’expression du visage paisible. Elle irradie un corps mêle de robustesse et de discrétion, formant ainsi autour d’elle une sphère qui maintient toute proximité à distance.
L’année passée, la créatrice britannique a aménagé son studio dans ce lieu, qui a été réaménagé par son ami Caius Pawson, fondateur du label de musique indépendant Young. Son rêve était de créer un espace qui regrouperait différents artistes, inspiré par le Black Mountain College, une université expérimentale établie en 1933 en Caroline du Nord (Etats-Unis). Le sous-sol de l’atelier héberge cinq studios d’enregistrement, dont celui de Sampha, un musicien britannique avec qui Grace a déjà travaillé.
Faire entendre les voix noires
La styliste travaille dans un open space avec des murs blancs et une atmosphère de concentration, regroupant moins de vingt collaborateurs. Des vêtements sont suspendus et rangés au fond de la salle, mais ce sont surtout les livres qui attirent l’attention. Tant d’étagères remplies de livres d’art et de design, mais aussi une multitude de références à des artistes et penseurs noirs, du continent africain et de la diaspora.
Grace Wales Bonner, qui célèbre actuellement le dixième anniversaire de sa marque, a toujours priorisé l’amplification des voix noires. Elle a toujours été déterminée à établir une marque de luxe, proposant une vision culturelle nouvelle avec une imagerie sophistiquée. Elle trouve une grande inspiration dans l’œuvre du peintre afro-américain Kerry James Marshall, reconnu pour sa valorisation de la représentation des Noirs dans l’art pictural. Elle a depuis longtemps compris que cette tâche est sérieuse et demande du temps.
En 2014, cette jeune britannique a attiré l’attention grâce à sa collection baptisée ‘Afrique’, présentée lors de ses études finales au Central Saint Martins College. Dans cette collection, elle a exploré les représentations de l’identité masculine noire et de la sexualité. Par la suite, elle a lancé sa marque pour hommes et, en 2016, elle a reçu le prix LVMH pour une collection basée sur le couronnement de l’empereur d’Éthiopie, Haïlé Sélassié en 1930.
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