Dans le contexte formel, il s’agissait simplement d’un déjeuner professionnel entre Emmanuel Macron et son homologue sénégalais, Bassirou Diomaye Faye. Ce n’était pas une visite officielle du dernier à Paris. Lors de leur premier face à face physique, suivant un appel de félicitations après le triomphe de Faye aux élections présidentielles sénégalaises du 24 mars, les deux leaders ont eu une conversation en privé à l’Elysée, le jeudi 20 juin, durant plus de deux heures.
Ceci indique qu’après une période de critiques sévères contre la politique française en Afrique – un sujet au cœur des discours des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), le parti qui a soutenu l’ascension au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye et de son premier ministre charismatique Ousmane Sonko – il est désormais temps pour une phase d’apprivoisement entre les deux leaders. Bien que le nouveau président sénégalais ait officiellement fait le voyage à Paris à l’invitation du Forum mondial pour la souveraineté et l’innovation vaccinales, et qu’il ait, selon son entourage, « accepté » la rencontre avec Emmanuel Macron, sa délégation comprenait plusieurs ministres tels que ceux de la défense, de l’économie et des affaires étrangères.
Le communiqué conjoint publié après leur discussion fait preuve que « les deux présidents ont exprimé leur intention mutuelle de redynamiser le partenariat entre le Sénégal et la France, basé sur un respect réciproque, un partenariat équilibré au bénéfice des intérêts réciproques des deux nations ».
« Selon une source élyséenne, tous les sujets ont été abordés lors de la rencontre initiale, suscitant de la satisfaction quant à son ton. La France pourrait craindre qu’une vague similaire à celle observée au Mali, au Burkina Faso ou au Niger ne l’atteigne au Sénégal. Néanmoins, l’Elysée n’éprouve pas d’inquiétude mais suit plutôt attentivement les avancées politiques du président souverainiste et panafricaniste qui est aussi un des premiers associés de la France en Afrique de l’Ouest.
« Ils sont à l’écoute des besoins »
Aucune déclaration n’a été faite à l’issue de cette rencontre, que ce soit sur le plan économique ou de la défense. Pour ce qui est de l’avenir des installations militaires et des environ 350 soldats français basés à Dakar, « Emmanuel Macron a évoqué la logique de la réduction des troupes, mais ils écoutent les besoins. Pour le moment, rien n’est définitif », explique la source précitée. Paris, souhaitant diminuer le nombre de soldats dans ses bases africaines, et Dakar qui critique régulièrement la présence de troupes étrangères, pourraient trouver des points communs.
En matière économique, Bassirou Diomaye Faye devrait s’entretenir avec des dirigeants français vendredi mais aucun engagement n’a été annoncé publiquement. La France demeure le premier investisseur étranger au Sénégal et son second partenaire commercial après la Chine. Plus de 250 entreprises françaises sont implantées au Sénégal, représentant près d’un quart des recettes fiscales du pays.
Dans ce cadre, Emmanuel Macron a également discuté de la situation au Soudan avec Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union africaine, alors que le pays est toujours en proie à la guerre entre généraux rivaux et que les médiations régionales n’avancent pas.
Dans une entrevue prévue jeudi soir, le premier dirigeant de la France avait comme intention de rappeler au président du Rwanda, Paul Kagame, de mettre fin à son aide aux insurgés du M23 qui sont sur une offensive dans l’est de la République démocratique du Congo. De plus, il voulait encourager une stratégie globale afin d’aspirer à mettre fin à la tension dans cette partie de la région des Grands Lacs, selon les déclarations de l’Elysée.