Quand un microbiologiste entend les mots « La Mecque » et « syndrome respiratoire », il est instantanément sur ses gardes. Ce fut le cas de Laurent Dacheux, le leader suppléant de l’unité d’intervention biologique d’urgence (CIBU) de l’Institut Pasteur à Paris, lorsqu’il a été informé d’un cas suspect à Angers : un homme souffrant de légères difficultés à respirer après un pèlerinage à la ville sacrée d’Arabie Saoudite.
Considérant ces symptômes, Dacheux a tout de suite pensé au virus MERS-CoV, associé au syndrome respiratoire du Moyen-Orient, qui se contracte auprès des dromadaires et qui est mortel dans 35% des cas. Bien que ce virus n’ait jamais été observé en transmission interhumaine à grande échelle, il a déjà été contracté dans des hôpitaux, et l’Arabie Saoudite compte pour 80% des cas déclarés à travers le monde.
Rapidement, l’échantillon a été remis à Dacheux, qui a effectué un test prioritaire visant à confirmer la présence du MERS-CoV. Le résultat est revenu négatif. Par la suite, un test « multiplex » a été réalisé, capable de détecter une variété d’autres agents causant des infections respiratoires, dont le virus SARS-CoV-2 ou le virus responsable des bronchiolites. La CIBU est réputée pour développer ses propres outils capables d’identifier plusieurs dizaines de pathogènes à la fois. Quarante minutes plus tard, le verdict est tombé : le patient avait uniquement la grippe. Une journée typique pour la CIBU.
Les microbes : l’ennemi ultime.
Créée en septembre 2002 après l’incident des enveloppes contenant des bacilles de charbon aux États-Unis qui a fait cinq morts, la cellule a vu le jour. Elle possède un potentiel de diagnostic étendu, permettant entre autres d’intervenir lorsque les hôpitaux sont incapables de comprendre une situation grave, comme le souligne Laurent Dacheux. L’objectif principal en cas de confrontation avec un agent pathogène n’est pas nécessairement d’identifier instantanément de quoi il s’agit, mais de déterminer ce qu’il n’est pas. Jessica Vanhomwegen, qui dirige le service d’identification des virus au sein de la cellule, précise qu’ils effectuent souvent un diagnostic d’exclusion pour éliminer toute menace potentielle pour la santé publique.
Durant l’épidémie de SARS-CoV-2, une équipe d’une vingtaine de membres a travaillé sans relâche. Bien que la situation sanitaire mondiale se soit un peu améliorée, elle demeure néanmoins problématique avec de multiples défis. Par exemple, la grippe aviaire H5N1 affecte de nombreux élevages laitiers aux États-Unis, ce qui suscite une « grave préoccupation » de l’OMS. En outre, la dengue sévit en Amérique latine et dans les Antilles, y compris la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe. Des situations qui justifient le maintien de la vigilance. Lors des prochains Jeux Olympiques et Paralympiques, en prévision de possibles contaminations dues aux rassemblements de personnes, l’équipe de garde de la CIBU passera de deux à quatre membres.
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