À la fin juillet, la transparence financière en France va subir un coup dur suite à la fermeture de son registre public des propriétaires réels d’entreprises (RBE). Cette décision a été corroborée par la direction générale du trésor (DGT), une branche du ministère des finances.
Inauguré en avril 2021, le RBE permettait à quiconque d’accéder aux informations sur les propriétaires des sociétés françaises grâce à Data.inpi.fr ou par le biais d’autres plateformes spécialisées dans la divulgation de données légales, comme Pappers, Doctrine et Societe.ninja. Longuement sollicité par différentes organisations civiles, le RBE représentait un progrès important dans le domaine de la transparence financière et la lutte contre la fraude et le blanchiment d’argent. L’absence d’informations sur les propriétaires réels rend en effet possible pour les criminels et individus sanctionnés de se cacher, de manière tout à fait légale, derrière des hommes de paille ou des entreprises écran qui agissent en tant que dirigeants ou actionnaires.
Certaines personnes qui sont bénéficiaires d’entreprises regrettaient que le registre public empiète grandement sur leur vie privée, en divulguant leur date de naissance et un aperçu de leurs possessions. Cependant, au cours des trois dernières années, l’utilisation de ce registre est devenue une habitude pour de nombreux professionnels du monde économique. Selon Pierre Fruchard, le fondateur de Pappers, « le bénéficiaire est une information essentielle pour identifier qui se cache derrière une entreprise, une information très utile et souvent recherchée par nos utilisateurs ». Hugo Ruggieri, le directeur juridique et des affaires publiques chez Doctrine, ajoute : « Dans un monde de plus en plus complexe, il est crucial de savoir avec qui on fait affaire. Par exemple, si un boulanger veut s’assurer que son blé ne provient pas de sources russes, cette vérification deviendra malheureusement très difficile. »
L’utilisation du registre du bénéficiaire économique (RBE) par les médias pour enquêter sur la corruption et la criminalité financière était également très courante. En juillet 2022, le magazine L’Obs avait utilisé ce registre pour découvir que près de soixante personnes impliquées dans des affaires de corruption ou faisant l’objet de sanctions internationales avaient investi de manière importante dans l’immobilier français. Le même registre a également permis au média d’investigation Disclose de remettre en question les relations d’Agnès Pannier-Runacher, alors ministre de la transition énergétique, avec la société pétrolière Perenco, la poussant ainsi à promulguer un décret se retirant des décisions concernant cette entreprise. Le Monde utilise régulièrement ce registre pour mettre en lumière les conflits d’intérêts des politiques, suivre la trace de mouvements sectaires ésotériques ou de possibles « biens mal acquis ».
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