Comme il est de coutume, le Rassemblement national (RN) a focalisé sa campagne sur ses deux problématiques majeures, constamment reliées par Jordan Bardella : le combat contre l’immigration et l’assurance de la sécurité pour tous.
Diverses mesures ont été mises en avant dans cette catégorie, y compris la revendication de l’auto-défense présumée pour les policiers, une idée déjà présentée par Marine Le Pen en 2017 et 2012, et même par son père, Jean-Marie Le Pen, en 2007. Récemment, en 2022, les députés du RN ont proposé une loi qui soutiendrait cette notion, mais elle a été refusée par les commissions de l’Assemblée nationale. Le mouvement Reconquête! a également abordé ce sujet, avec Eric Zemmour et Marion Maréchal demandant une présomption de légitime défense pour les forces de police depuis cette même année.
Pourquoi est-ce que l’extrême droite semble obsédée par l’idée de légitime défense policière? Une raison est qu’elle pourrait limiter les poursuites judiciaires contre les policiers. Cependant, l’auto-défense présumée ne modifierait pas les conditions d’utilisation des armes par les policiers, qui sont toujours encadrées par trois critères fondamentaux pour être qualifié comme « ayant tué en état de légitime défense »: la simultanéité, la proportionnalité et la réalité de la menace. Depuis 2017, les policiers ont également le droit de faire feu pour arrêter une « tuerie de masse » ou lorsqu’ils sont physiquement menacées, par exemple en cas de refus d’obtempérer.
La réintroduction de la présomption de légitime défense changerait la façon dont on envisage immédiatement l’action d’un policier, considérant qu’il a agi en état de légitime défense. Cette modification libérerait non seulement les policiers de la mise en garde à vue (un point que les syndicats et les policiers eux-mêmes trouvent significatif), mais inverserait aussi le fardeau de la preuve. Ce ne serait plus au policier de justifier son action comme légale, mais aux enquêteurs et aux juges de démontrer l’illégalité.
Cela rendrait le travail de la justice encore plus difficile. Il suffit de discuter avec des juges pour comprendre à quel point les procédures judiciaires dans les cas de brutalité policière sont complexes. Ceci est dû en partie au fait que dans certains cas, les policiers se couvrent mutuellement, alignent souvent leurs récits des événements, et résistent à fournir les preuves nécessaires à l’établissement des faits. Cette mesure compliquerait davantage le travail de la justice, et serait défavorable aux victimes et à leurs familles, pour lesquelles le RN ne semble pas s’inquiéter.
De plus, il est facile de prévoir que certains policiers se sentiraient plus à l’aise à utiliser leurs armes, se sentant plus protégés. Les changements de législation sur la légitime défense, pouvant semer la confusion parmi les forces de l’ordre concernant les conditions d’utilisation de leurs armes, peuvent aussi engendrer une augmentation du nombre de tirs et d’homicides commis par les policiers. Suite à l’adoption de la loi sur la sécurité publique en 2017, qui a autorisé l’usage d’armes en cas de désobéissance, le nombre de tirs dans ces situations a grimpé de 137 en 2016 à 202 en 2017, et le nombre de victimes tuées a été multiplié par cinq.
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