L’Union européenne est actuellement confrontée à deux formes de polarisation qui perturbent son unité interne ainsi que sa posture sur le plan global. D’un côté, nous avons la polarisation sociale et politique qui fait vaciller nos démocraties, une situation exacerbée par les crises récentes telle que la pandémie de Covid-19, les conflits en Ukraine et à Gaza et les tensions économiques liées au prix de l’énergie et à l’inflation. De l’autre, il y a la polarisation géopolitique, aggravée par la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis, qui redéfinit l’équilibre mondial, souvent au détriment des intérêts industriels et stratégiques de l’Europe.
Les élections européennes mettent bien en évidence non pas une « crise de la démocratie » mais plutôt un reflet de celle-ci dans un contexte où les citoyens européens sont préoccupés par le déclin européen et contestent l’insuffisance ou l’inefficacité des politiques menées pour y remédier. L’augmentation de la popularité de l’extrême droite en France et à travers l’Europe indique en fait une « crise de performance » des gouvernements actuels, face à des enjeux prioritaires pour les citoyens européens tels que le coût de la vie, le changement climatique, l’immigration et le retour des conflits armés sur le continent.
En France, la chute de productivité, le triple déficit (commercial, public, financier) ainsi que le déplacement des entreprises vers les Etats-Unis pour des raisons de coûts d’énergie plus faibles et de l’attrait du marché en lien avec l’Inflation Reduction Act [promulgué en août 2022] renforcent chez les Français le sentiment d’une mauvaise gestion et d’une course incontrôlée vers l’avenir.
Concernant divers sujets, l’Union européenne (UE) est souvent vue comme un obstacle plutôt qu’une aide. De nombreux citoyens perçoivent l’UE comme trop punitive et réglementaire, en particulier en ce qui concerne la transition écologique, avec son pacte vert qui augmente les tensions territoriales et notre dépendance à l’égard de la Chine. On critique aussi l’UE pour son manque de rigueur en matière de politique migratoire et son insuffisance stratégique sur le plan géoéconomique et géopolitique, ce qui amplifie notre vulnérabilité et dépendance face à la Chine et aux Etats-Unis. La solution à ses problèmes se trouve dans la mise en place de l’agenda de Versailles [établi pendant la présidence française du Conseil de l’UE en 2022] sur la souveraineté européenne, un concept qui peine cependant à s’implanter en France.
Divisions Est-Ouest se renforcent
Plusieurs évolutions majeures apparaissent indépendamment des résultats des élections législatives anticipées : la dégradation du leadership franco-allemand se poursuivra et accélérera la redéfinition des équilibres politiques en Europe ; la métamorphose du paysage politique français se poursuivra avec l’intégration du Rassemblement national (RN) au sein de la nouvelle norme, affaiblissant la position de la France au sein de l’Europe ; l’agenda européen sera ajusté pour répondre aux préoccupations exprimées lors de ces élections.
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