Bruxelles a révélé le mercredi 12 juin une augmentation potentielle allant jusqu’à 28% des tarifs douaniers européens sur les importations de voitures électriques en provenance de Chine, tout en tentant d’éviter un conflit commercial avec Pékin, qui est accusé d’avoir illégalement privilégié ses constructeurs automobiles. L’Allemagne, qui est fortement impliquée en Chine, a lutté aux côtés de la Suède et de la Hongrie contre ces sanctions de peur de représailles. En revanche, la France et l’Espagne ont fait pression pour des mesures ciblées et proportionnées.
La Chine a rapidement rejeté cette action comme un « comportement protectionniste pur » de la part des Européens, selon un communiqué du ministère du commerce. La Chine a aussi averti qu’elle « prendra toutes les mesures pour défendre vivement ses droits légitimes ».
Auparavant, les voitures produites dans les usines chinoises étaient taxées à 10% dans l’Union européenne (UE). Bruxelles envisage d’augmenter ces droits à 17,4% pour le constructeur chinois BYD, 20% pour Geely et 38,1% pour SAIC. Un taux moyen de 21% devrait être appliqué pour les autres fabricants. Bruxelles a précisé que « si les négociations avec les autorités chinoises ne parviennent pas à une solution efficace, ces droits compensatoires provisoires seraient introduits à partir du 4 juillet ». Après l’instauration de droits provisoires, Bruxelles aura quatre mois pour imposer des droits définitifs, ce qui offre une opportunité de dialogue jusqu’en novembre.
L’Europe abrite des marques de voitures haut de gamme, de Mercedes à Ferrari. Bien qu’elle soit le leader des moteurs à essence et diesel, elle craint de voir ses usines disparaître si elle ne parvient pas à endiguer la vague annoncée des modèles chinois, qui ont une longueur d’avance dans le domaine de l’électricité.
Dans le cadre des tensions commerciales croissantes entre l’Occident, avec Washington à la tête, et la grande puissance asiatique, celle-ci est également accusée de détruire la concurrence dans divers secteurs tels que les éoliennes, les panneaux solaires et les batteries. Le président américain, Joe Biden, a augmenté le 14 mai les tarifs douaniers sur les voitures électriques chinoises à 100 %, par rapport à 25 % précédemment, faisant du marché américain un bastion où Tesla, le géant national, domine sans rival.
Parallèlement, une semaine plus tard, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a déclaré que la réaction européenne serait « plus focalisée », avec un tarif proportionnel « au niveau du dommage » subi. Cela pourrait freiner les importations de voitures électriques chinoises sans les interdire totalement. L’UE espère protéger un secteur qui emploie 14,6 millions de travailleurs dans l’UE tout en évitant un conflit destructeur avec son deuxième partenaire économique, après les États-Unis.
Pour sa part, Pékin a déjà annoncé en janvier une enquête sur toutes les eaux-de-vie de vin importées de l’Union européenne, y compris le cognac. Selon la presse gouvernementale chinoise, le vin, les produits laitiers, le porc et les grosses voitures pourraient être également ciblés. « Nous répétons notre inquiétude la plus profonde », a déclaré Florent Morillon, président du Bureau national interprofessionnel du cognac, le mercredi.
Il existe une certaine anxiété parmi les fabricants de voitures allemands comme Audi, BMW, Mercedes et Volkswagen, qui accumulent presque 40 % de leurs ventes globales en Chine. La présidente de la Fédération allemande de l’industrie automobile (VDA), Hildegard Müller, a exprimé que les conséquences des mesures proclamées récemment pourraient surpasser les bénéfices éventuels pour l’industrie automobile européenne. Quant aux constructeurs automobiles français, Renault, Peugeot et Citroën, ils ne sont pas présents sur le premier marché mondial.
En Europe, les marques de voitures chinoises connaissent une croissance rapide grâce à leurs prix compétitifs. La part de marché des voitures électriques chinoises est passée de moins de 2 % fin 2021 à près de 8 % fin 2023, selon l’institut Jato. Cette hausse est en grande partie due à l’interdiction de vendre des moteurs à essence et diesel par l’Union européenne à partir de 2035 pour lutter contre le changement climatique.