Est-ce que la politique sanitaire relative à la drogue est toujours en vigueur? Est-il possible de prendre soin des consommateurs qui en ont besoin tout en soulignant leur participation dans les trafics et les violences qui en résultent? Dans cette balance entre santé et sécurité, aussi ancienne que la bataille contre la drogue, le gouvernement semble préférer un côté. C’est du moins l’impression donnée par une communication politique de plus en plus agressive.
« Operation nettoyage XXL » soutenue par le ministre de l’interieur, Gérald Darmanin, à « le joint du samedi soir [qui] a le goût du sang séché sur les trottoirs », déclarée par son homologue à la justice, Eric Dupond-Moretti, la rhétorique de la « guerre contre la drogue » déclarée par Emmanuel Macron en 2021, et de l’utilisateur de drogue complice, s’est imposé. Aucun discours concret sur la prévention, l’accompagnement et le soin ne semble équilibrer cette rhétorique au ministère de la santé.
Il y a effectivement une « Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives » (Mildeca) qui inclut l’aspect sanitaire, une stratégie sur cinq ans (2023-2027), des actions et des programmes mis en œuvre localement, mais ils ne semblent pas bénéficier d’un soutien politique concret. Les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé, les experts en addictions parlent d’une « disparition », d’une « invisibilité » de cet aspect des politiques publiques. Ceci n’est pas sans conséquences.
Le symbole emblématique d’un certain dilemme a été le débat autour de l’instauration de nouveaux centres de consommation sûrs, souvent appelés « salles de shoot », conçus pour ceux qui utilisent ou inhalent des substances illicites. Ces centres représentent une étape finale très visible dans la stratégie de « réduction des risques » visant les utilisateurs de crack et d’héroïne, généralement parmi les plus marginalisés. Deux de ces centres ont été mis à l’essai à Paris et Strasbourg depuis 2016. Cependant, malgré le soutien lors du premier mandat d’Emmanuel Macron et des plans récents à Marseille, Lille et Paris, l’expansion de cette initiative n’a pas abouti.
Un petit vent de changement
Olivier Véran, ancien ministre de la Santé, avait pourtant prévu leur expansion, sous le nom de « haltes soins addictions », dans le budget 2022. Pourtant, chaque tentative a rencontré l’opposition de la communauté locale et a finalement échoué, au grand désarroi des parties prenantes qui critiquent le blocage continu des préfectures. Les successeurs de M. Véran à l’Avenue de Ségur n’ont pas vraiment pris de position officielle.
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