Pendant leur séjour de trois mois à Gaza, les militaires médicaux jordaniens Talal Al-Jalabneh, un chirurgien, Mohamed Ismaïl, un anesthésiste, et Moath Al-Qawaqenah, un pédiatre, ont assisté aux attaques contre les civils gazaouis au cours de la guerre initiée par Israël le 7 octobre 2023, visant à éliminer le Hamas. Ces professionnels de la santé ont l’habitude de traiter des traumatismes graves au sein du centre médical Roi-Hussein à Amman, un grand complexe hospitalier militaire reconnu à travers le pays, fréquenté par des militaires et des civils, en cette matinée de mai. Tous ont eu une expérience préalable en zones de conflit. « Cependant, Gaza d’aujourd’hui ne peut être comparée à d’autres champs de bataille, tels que l’Irak ou l’Afghanistan. Ce qui se passe à Gaza est sans précédent », estime le lieutenant-colonel Talal Al-Jalabneh, en exhibant des clichés épouvantables de blessés dans un bureau du centre médical, avec l’approbation de ses collègues.
Ils ont travaillé dans deux hôpitaux, dirigés par l’armée jordanienne à l’intérieur de l’enclave palestinienne, dont un hôpital de terrain établi à Khan Younès, dans le sud, depuis le début du conflit. Ces structures médicales fonctionnent en toute discrétion et ont accueilli des dizaines de milliers de blessés ou de malades depuis octobre 2023.
Les professionnels de santé, ayant échangé leur équipement médical contre des uniformes lors de leur entrevue avec Le Monde, décrivent l’horreur qu’ils ont vécue à Gaza : ils ont été témoins de blessures graves, d’enfants malnutris et de familles anéanties. « Au début de notre déploiement [en décembre 2023], lorsque nous nous occupions d’un enfant, je lui demandais : “Est-ce ton père à côté de toi ?” J’ai cessé de poser cette question, car trop d’enfants me répondaient : “Mon père est mort” », témoigne le Dr Al-Jalabneh, avant d’ajouter : « Si vous étiez à notre place, vous souhaiteriez que cette guerre prenne fin le plus tôt possible. »
Attaques incessantes
« En nous rendant à Gaza, nous nous attendions à soigner un grand nombre de patients, mais pas à cette échelle », souligne le lieutenant-colonel Mohamed Ismaïl. Nous avons dû ajouter des lits par terre à certaines occasions. Alors que ces deux officiers étaient en poste à Khan Younès, la ville est devenue un « point de tension », en raison de la campagne militaire israélienne pendant l’hiver. Après la première semaine sur place, les attaques sont devenues ininterrompues, « tout autour » d’eux. L’hôpital de campagne a été touché à deux reprises : une première fois en novembre 2023 – du personnel médical a été blessé et évacué – puis à nouveau en janvier.
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