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12 juin 2024 11 h 13 min

« Logistique JO: Casse-tête du Dernier Kilomètre »

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Dans le cadre de ses responsabilités d’achats logistiques et de gestion de stock pour l’épicerie locale Le Zingam, qui compte trois points de vente dans l’est de Paris et dessert également 150 restaurants, Mylène Dupas a pris des mesures pour entrer en collision avec la ruée estivale liée aux Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Elle a trouvé des solutions grâce au site Anticiperlesjeux.gouv.fr. Elle exprime son admiration pour la qualité des cartes fournies sur le site, qui offrent des indications précises jour par jour, heure par heure, sur les embouteillages potentiels autour des sites olympiques. Bien que l’été soit généralement une période calme pour Le Zingam, Mylène Dupas organise des stratégies, comme informer les conducteurs de camionnettes de livraison d’éviter de traverser Paris lors de marathon ou de cyclisme, et de préférer l’autoroute périphérique. Elle envisage cependant que l’une des voies de cette route sera réservée aux véhicules autorisés.

Comme Mylène Dupas, les fournisseurs et les commerçants de la région parisienne se préparent du mieux qu’ils peuvent : ils planifient plus d’espaces de stockage, prévoient des coupures de climatisation, renforcent les alertes pour les prestataires intermittents et envisagent même une prime spéciale pour leurs employés. Ils sont habitués aux tourbillons d’actualités de la capitale, se déplaçant diligemment dans leurs fourgonnettes blanches à la recherche d’un lieu de livraison qui n’est pas abusivement occupé. Ils manœuvrent entre les grèves, les rassemblements, les célébrations et les hommages qui perturbent les itinéraires et les plannings. Cependant, cette fois, l’événement durera quatre semaines en deux segments, du 26 juillet au 11 août et du 28 août au 8 septembre, sans mentionner les périodes de préparation et de démontage. Les perturbations, qui ont débuté en mai, se prolongeront jusqu’en octobre et atteindront leur apogée pendant les huit jours précédant l’ouverture le 26 juillet, où le passage sur la Seine sera sévèrement surveillé.

L’industrie logistique devrait être fortement sollicitée. Les quinze millions de visiteurs olympiques qui vont probablement consommer plus que les parisiens eux-mêmes dans les cafés et restaurants. En mars, le gouvernement prévoyait « un doublement du flux de marchandises, avec huit millions de collectes ou de livraisons prévues chaque semaine durant les Jeux ». Les citoyens sont incités à limiter leurs demandes de livraison à domicile. En outre, la Ville de Paris reconnaît qu’il y aura une augmentation du traitement des déchets.

« C’est un peu comme jouer à la loterie ».

Selon Jean-Michel Genestier, maire Les Républicains du Raincy (Seine-Saint-Denis) et membre du conseil de la Métropole du Grand Paris pour le secteur logistique, cette dernière est essentielle pour la livraison, l’approvisionnement et l’alimentation. Cependant, elle reste peu reconnue, même si elle n’a pas besoin de discours politiques et d’investissements massifs comme pour le transport des personnes. Les produits transportés, du dépôt aux camions, puis aux réserves, nécessitent des conditions de transport moins strictes, bien que certains soient sensibles à la température, à la lumière ou au temps qui passe. Ils requièrent une assistance pour leur conditionnement, car ils ne peuvent pas se transporter de manière autonome et, comme mentionné par l’Union des entreprises de transport et de logistique de France, ils n’ont pas de droit de vote.

La logistique est souvent considérée comme une nuisance dans les zones urbaines, car elle génère du bruit, encombre l’espace, crée des embouteillages et pollue l’environnement. Chloé Bouilloux, responsable de Cargonautes, une coopérative de logistique qui utilise des vélos-cargo pour livrer les entreprises et compte quarante employés, constate que certains responsables publics aimeraient que les marchandises soient livrées pendant la nuit pour limiter ces désagréments.

Dans le secteur de la logistique, comme dans le commerce, les préparatifs sont en cours, bien qu’ils soient effectués à tâtons par moment. Pascal Clément, directeur général de OBD Grand Paris, explique qu’ils ont dû élaborer leurs propres itinéraires alternatifs en fonction des divers emplacements et horaires des manifestations, et ce, principalement parce que les informations concernant la cérémonie d’ouverture leur sont parvenues tardivement. Ils ont dû recourir à Excel pour accomplir cette tâche. La société, qui livre quotidiennement environ 2000 hôtels et restaurants dans la région de l’Ile-de-France, s’attend à une certaine part d’imprévisibilité, une supposition corroborée par Nicolas Héry, responsable de Stef pour la région Île-de-France. Stef, une entreprise majeure de livraison de produits frais qui emploie 22 000 personnes en Europe, a recruté 75 employés supplémentaires en prévision des Jeux Olympiques et Paralympiques. Selon M. Héry, les tournées de livraison pourraient être plus longues. Dans une zone où ils livrent habituellement à vingt clients chaque matin, ils pourraient être limités à six.

Les professionnels de la logistique sont parfaitement familiers avec les spécificités des zones « rouges » et « bleues » encerclant les lieux des compétitions. Les zones rouges, quelques rues entourant chaque lieu, seront fermées à tous les véhicules motorisés. La police arrêtera les camionnettes et scooters de livraison et exigera une preuve qui indique l’immatriculation du véhicule et l’identité du chauffeur.

Les espaces plus vastes, connus sous le nom de zones bleues, n’auront pour effet que de perturber le trafic de transit. En d’autres termes, les voitures et autres engins motorisés pourront y accéder tout en ayant un objectif spécifique. Le contrôle ne sera pas constant. « Les zones bleues sont utilisées pour contrôler les mouvements et réduire la congestion près des zones rouges », déclare Jean-André Lasserre, qui a dirigé l’initiative nommée « Logistique urbaine quotidienne pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques », en collaboration avec les autorités et les professionnels du domaine.

Suite à ces efforts, une plateforme cartographique gratuite nommée Joptimiz a été élaborée. Elle catalogue minutieusement les espaces de livraison disponibles et offre la possibilité de demander un laissez-passer digital sous forme de QR code. Jean-André Lasserre encourage fortement les transporteurs à utiliser cet outil, y compris dans les zones bleues où ce n’est pas obligatoire. « Les Jeux Olympiques et Paralympiques feront appel à des renforts de police qui ne sont pas familiers avec Paris. Par conséquent, le laissez-passer numérique facilitera les vérifications », confirme Maxime Sassi, responsable du projet Paris 2024 à la préfecture de police, lors d’une conférence de presse sur la logistique olympique le 25 avril.

Une exception est accordée pour les serveuses de bière.

Il a été nécessaire de tenir de nombreuses conférences entre les autorités et le secteur de la logistique pour régler certains détails spécifiques. Parmi ceux-ci se trouvait la question des matières dangereuses, que le commissaire de police avait complètement banni de toutes les zones. Cependant, parmi ces substances dangereuses, il y a des produits que nous utilisons tous les jours, comme les cartouches de CO2, qui sont essentielles pour les pompes à bière. Au sein du système calibré avec précision de la fête olympique, l’aspect de la « demi-pression » n’est pas négligeable. Comme Jean Castex, PDG de la RATP, explique, « les stands de boissons dans l’espace public sont une façon de gérer la foule » qui sort des stades temporaires. Par conséquent, il a été nécessaire d’accorder une exemption pour ces installations.

Le plan de sécurité, qui laisse les piétons et les cyclistes libres de se déplacer dans les zones sécurisées, favorise explicitement la cyclologistique. Cette industrie, qui compte vingt-cinq participants en Île-de-France, a publié un guide présentant les différents types de vélos de transport de marchandises et les poids qu’ils peuvent supporter – jusqu’à 350 kilos et 2 mètres cubes. Cependant, comme le souligne Amauric Guinard, dirigeant de l’entreprise ColisActiv’ qui encourage ce mode de transport, « les vélos ne peuvent pas tout faire ». En prévision des Jeux, les entreprises de cyclologistique ont signé des contrats, acheté du matériel et embauché de la main-d’œuvre dès la fin de l’hiver. « Si un client veut utiliser la livraison à vélo, il ne peut pas juste le faire pour un été ; il doit s’engager à long terme », déclare l’expert.

Est-il possible qu’une logistique plus éthique se démarque grâce aux JOP ? Selon Jean-André Lasserre, « les innovations numériques mises en place pour les Jeux bénéficieront à toutes les collectivités souhaitant instaurer une zone à circulation restreinte », un secteur réservé aux résidents, commerçants et livreurs. Anticipe-t-on à travers la ville olympique la métropole future ?
Vous pouvez consulter tous les épisodes de la série ici.

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