Stéphanie Lacour, aujourd’hui professeure à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et directrice de l’Institut Neuro-X à Genève, considère que sa vie a pris un tournant inattendu à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) en été 2000. Elle était alors une doctorante en électronique à Lyon, destinée à rester en France, qui devait subitement prendre la parole lors d’une conférence à la place de son responsable. Elle a présenté son travail de thèse sur un capteur en silicium poreux qui mesure l’hydratation de la peau sans se rendre compte que Sigurd Wagner, professeur en génie électrique de l’université de Princeton (New Jersey), l’écoutait attentivement. Sans connaître les détails de ses recherches, Wagner a trouvé l’explication de Lacour claire et perspicace. Finalement, il l’a invitée à visiter Princeton, un geste qui a complètement changé ses plans pour l’avenir. À partir de Princeton, elle s’est déplacée à Cambridge (Royaume-Uni) et à la EPFL (Suisse), intégrant biologie et médecine dans son parcours pour devenir pionnière mondiale de l’électronique flexible pour des applications médicales. Actuellement âgée de 48 ans et mère de deux enfants, Lacour a été sélectionnée comme chercheuse invitée au Collège de France pour l’année 2023-2024 par la chaire Innovation technologique Liliane Bettencourt. Son mentor, Sigurd Wagner, n’a pas manqué d’assister à sa leçon inaugurale, intitulée « Neurotechnologie : science et ingénierie pour de nouvelles thérapies », le 29 février dernier.
Dans une soirée d’engagement scientifique à une salle pleine, Stéphanie Lacour a mis en évidence l’importance de sa spécialisation souvent ignorée au fil de l’histoire scientifique. Elle a souligné le rôle de « Big Toe » (3000 avant JC), la prothèse du gros orteil connue la plus ancienne, ainsi que le papyrus Edwin Smith (1600 avant JC), le premier enregistrement connu de la chirurgie cérébrale. Lacour a ensuite discuté de la manière dont son travail intègre les neurosciences, étudie le cerveau dans des états sains et malades, ainsi que la technologie, incluant les machines, les équipements matériels et les logiciels, tout en cherchant à atténuer ou à réparer certains dysfonctionnements de maladies neurologiques.
Elle et Sigurd Wagner ont maintenu une relation professionnelle étroite. « Stéphanie me contacte toujours pour des décisions significatives, mais la plupart du temps, elle choisit de ne pas suivre mes conseils. C’est une Auvergnate », raconte Wagner. Il se rappelle comment elle l’a impressionné quand elle est arrivée à Princeton pour son post-doctorat. Il s’efforçait à l’époque de développer une peau électronique sensible pour un robot, une tâche qui avait laissé un jeune chercheur en difficulté, mais qui avait été relevée par Lacour : « Non seulement elle a produit une solution, mais elle a aussi découvert une caractéristique physique inédite : un métal sur un substrat d’élastomère peut être étiré bien plus intensément sans casser », raconte Wagner. Cette découverte a influencé le travail de l’expérimentateur des matériaux Zhigang Suo, auparavant à Princeton, maintenant à Harvard, sur la mécanique des matériaux souples.
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