Le 14 mai dernier, le Sénat a suggéré, dans un rapport sur le trafic de drogue, l’établissement d’un nouveau parquet national antistupéfiants. Cette idée est-elle pertinente? Il convient d’affirmer dès maintenant que l’ajustement constant du système judiciaire face aux mutations de la criminalité apparaît comme un impératif vital pour notre communauté. L’objection qui moque les lois spécifiques souvent instaurées suite à des incidents tragiques, afin de renforcer certaines sanctions, n’est pas suffisante pour priver la société du droit de se protéger de manière plus poussée et plus efficace contre la délinquance et le crime.
Il s’agit en effet de réformes structurelles, de modernisation du système judiciaire et de la manière dont la justice est rendue, face à l’émergence de nouvelles sortes de criminalité et leur radicalisation. Le mouvement historique vers cette direction est d’ailleurs bien établi et pourrait trouver ses racines dans les chambres financières et fiscales instituées par Louis XIV et Colbert pour juger les malversations et corruptions reprochées au surintendant Fouquet et son entourage : un précurseur du Parquet national financier (PNF) du Grand Siècle, en quelque sorte.
Aujourd’hui, des avertissements sont lancés de toutes parts concernant la hausse d’une criminalité violente et organisée qui mélange étroitement, dans une dérive mafieuse, les divers trafics, les violences contre les individus et le blanchiment d’argent. On assiste à une banalisation de la circulation des armes de guerre.
Dans une fusion peu courante, la même situation est critiquée et corroborée par les juges, les forces de l’ordre, les sociologues, et les dirigeants politiques, comme le démontre le rapport d’investigation du Sénat sur le trafic de drogues. Une preuve tragique de cet état de choses est l’attaque fatale contre un camion de prisonniers à l’aide d’une arme lourde, le 14 mai, qui s’ajoute à l’observation de la généralisation de l’usage des armes de guerre. Cela a atteint un niveau qui sera probablement encore supérieur en raison de l’activité des routes d’approvisionnement alimentées par les zones de conflit du Proche-Orient et d’Europe de l’Est.
Que se passe-t-il en termes d’organisation pour traiter judiciairement ces phénomènes ? Le processus d’actualisation et d’adaptation de l’appareil juridique a été lancé il y a vingt ans avec la loi Perben 2. Le but de cette loi, pour combattre le crime organisé, était double : établir une procédure pénale spéciale permettant des enquêtes détaillées (agents infiltrants, écoutes téléphoniques, délateurs, gardes à vue prolongées, etc.), et centraliser le traitement judiciaire de ces affaires par des juridictions spécialisées – les huit JIRS (Juridictions Interrégionales Spécialisées).
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