Dans le livre « Neuf mois » écrit par Philippe Garnier et publié par L’Olivier, il dépeint une histoire touchante des derniers mois de la vie de sa femme et écrivain Elizabeth Stromme, lorsqu’elle avait 59 ans à l’automne 2006 en Californie. Elle était atteinte d’un cancer. Garnier a tardé plus de quinze ans avant d’écrire ce livre poignant et dur, plein d’une beauté qui est parfois tranchante et parfois presque insupportable. Il avait peur de ne pas être « à la hauteur » du défi – le défi d’être à la hauteur de son amour pour sa femme et aussi d’écrire un livre qui pourrait satisfaire ses normes élevées de style littéraire.
L’histoire se déroule dans une maison qui est située au milieu de vieux arbres, au nord de San Francisco, où Elizabeth a choisi de passer ses derniers jours avec son mari. Cette maison, bien que gracieusement prêtée, sert de cadre à la première partie du livre intitulée « La drôle de mort ». Tout dans cette maison semble confortable mais terne, construit avec des tons des années soixante-dix qui rappellent un certain idéal de vacances américaines.
En effet, Elizabeth a planifié minutieusement ses derniers jours. Elle a décidé de refuser tout traitement inutile et a choisi de mourir entre le jour de Thanksgiving et les célébrations de fin d’année. La seule aide qu’elle accepte est celle de la morphine et de son mari qui, selon le rituel, se succèdent dans des journées rythmées par les soins, les massages, les repas et les feux de bois.
Philippe Garnier décrit le quotidien et les activités de cette période étrangement en suspension : l’arrangement crucial des coussins, le soleil brillant sur la terrasse, la lecture régulière du New York Times… Toutefois, la mort n’est pas si simple, même lorsqu’elle est volontairement choisie. Avec seulement quelques dates comme références, il peint dans de petits passages, l’intrigante réalité d’une fin qui se détaille dans sa triste et touchante matérialité : le corps qui se retire lentement de la vie, le silence persistant, les questions, l’étourdissement de celui qui reste là, endeuillé.
Il nous parle également des parties sombres de l’âme.
L’absence totale de complaisance de l’auteur est remarquable, car il reste fidèle à son style qui a fait sa notoriété de journaliste respecté: une écriture dense, précise et subtile qui n’évite pas l’introspection, ni les aspects sombres de l’âme, ni les moments soudains d’amour véritable. Ce mélange singulier est identifiable dans l’œuvre Neuf mois, un livre unique qui s’attarde aussi bien sur la vie que sur la mort. La deuxième partie de ce livre est justement nommée « La drôle de vie », et le récit se déplace vers le passé d’une longue romance qui débuta quand Garnier revient de son premier voyage aux États-Unis, où il passera une grande partie de sa vie avec Elizabeth… Une femme est finement dessinée à travers ce récit, celle d’une femme singulière d’une intégrité morale hors du commun, « originale », et pour certains « difficile à gérer » ou « carrément insupportable », qui renonce aux privilèges de sa classe sociale d’origine, dans le Minnesota, en choisisant toujours une certaine droiture de liberté, même dans sa décision de mourir.
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