Est-ce qu’en 2024, nous assisterons à un changement majeur dans l’imposition des grandes fortunes internationales? Depuis une décennie, sous l’autorité du G20 et de l’OCDE, des progrès significatifs ont été accomplis dans le combat contre l’opacité bancaire et l’évasion fiscale par les grandes entreprises. Ces démarches ont culminé en signant un accord pour établir une taxe minimale de 15% sur les profits des entreprises multinationales, mise en application le 1er janvier dans l’Union Européenne et une dizaine d’autres pays.
On entend de plus en plus de demandes pour étendre ce progrès à l’imposition des grandes richesses. Le Brésil, qui assure la présidence du G20 en 2024, a démontré une volonté remarquable à cet égard et a inscrit ce thème à l’agenda des négociations internationales.
Cela représenterait une évolution logique. Comme le montre le « Rapport mondial sur l’évasion fiscale 2024 », publié en octobre 2023 par l’Observatoire Européen de la Fiscalité, dans tous les pays où des informations sont disponibles, les milliardaires paient proportionnellement moins d’impôts (toutes taxes confondues) que le reste de la population. La raison est simple : les individus les plus aisés ont la possibilité de structurer leur patrimoine de manière à générer peu ou pas de revenus imposables, ce qui conduit à un quasi effondrement de l’impôt sur le revenu, traditionnellement perçu comme la pierre de touche de la progressivité fiscale.
L’année dernière, ProPublica, un média américain, a mis en lumière de manière significative le problème de l’évasion fiscale. Ils ont révélé que de nombreux magnats de l’industrie américaine contribuaient très peu aux revenus du Trésor public. Par exemple, Jeff Bezos n’a payé aucun impôt sur le revenu en 2011, et a même reçu des allocations familiales. Elon Musk, quant à lui, n’a payé que 8 410 dollars (soit environ 7 767 euros) en 2018.
Cependant, cette problématique ne se limite pas aux États-Unis. Elle est manifeste dans pratiquement tous les pays, et peut-être encore plus en France et dans l’Union européenne qui ont moins de dispositifs anti-abus efficaces. Par exemple, le recours à des sociétés holdings pour optimiser les impôts est plus fréquent.
La quasi non-imposition des milliardaires est difficile à justifier. En raison des besoins importants d’investissement en santé, éducation et dans la lutte contre le changement climatique, et face à la détérioration de la situation financière de nombreux pays suite à la crise du Covid-19, les gouvernements sont contraints de demander plus d’efforts fiscaux aux citoyens fortunés. Une demande difficile à accepter pour ces contribuables si les milliardaires peuvent s’y dérober. Il devient donc urgent de combler ce déficit fiscal.