L’infatigable opposante rwandaise, Diane Rwigara, a révélé son désir de se présenter à l’élection présidentielle à venir le 15 juillet, selon une annonce faite le 8 mai. Fille d’Assinapol Rwigara, un ex-financier du parti au pouvoir décédé en 2015 lors d’un accident de voiture que sa famille attribue à un meurtre, elle avait précédemment tenté, sans succès, de défier Paul Kagame voici cinq ans. Cette expérience s’était révélée être un supplice ; des clichés censés la montrer nue avaient été partagés en ligne sans que leurs sources soient identifiées et la Commission électorale avait rejeté sa candidature sous prétexte de faux en signatures. Suite à la réélection de Kagame quelques mois après, l’activiste a été arrêtée et accusée d’incitation à la révolte, entre autres.
Ayant passé un an derrière les barreaux, Diane Rwigara et son entourage proche, dont sa mère Adeline et ses quatre co-accusés, ont finalement été acquittés en décembre 2018. Cependant, la pression des autorités a continué. A peine trois mois après, d’après les renseignements obtenus par Le Monde et Forbidden Stories, qui ont mené une enquête sur les aspects opaques du régime Kagame, le numéro téléphonique de sa sœur, Anne Rwigara, était répertorié dans une liste de numéros susceptibles d’être ciblés pour une infection grâce au puissant logiciel espion Pegasus.
L’investigation intitulée « Rwanda Classified » a réuni 50 professionnels du journalisme de 17 différents médias établis dans 11 pays. Orchestrée par Forbidden Stories, cette enquête a débuté avec le décès suspect du journaliste John Williams Ntwali à Kigali en janvier 2023. L’objectif est de dévoiler les tactiques oppressives employées par le Rwanda, même au-delà de ses propres frontières. Cette réalité contraste fortement avec l’image d’un pays exemplaire que le Rwanda projette à l’international. Le 15 juillet, l’élection présidentielle devrait voir Paul Kagame réélu pour un quatrième mandat, Marquant ainsi trente ans depuis le génocide de 1994.
Selon nos sources, Anne Rwigara fut sélectionnée par l’utilisateur rwandais de Pegasus, un logiciel vendu uniquement aux services de police et de renseignement par NSO, une entreprise israélienne. En 2021, le « Projet Pegasus », une enquête d’envergure internationale, basée sur plus de 50 000 numéros de téléphone susceptibles d’être ciblés par le logiciel, a révélé que l’avocat de la famille, Gatera Gashabana, ainsi qu’au moins un journaliste couvrant le procès, avaient également été ciblés par le Rwanda via Pegasus.
Les proches de Kagame ont été ciblés
Sans possibilité d’analyse de son téléphone, on ne peut pas confirmer si le logiciel espion, capable de se faufiler dans l’appareil de ses victimes, a vraiment été utilisé pour espionner la sœur de l’opposante. Anne Rwigara, qui résidait aux États-Unis, est décédée dans des circonstances énigmatiques en décembre 2023, après avoir confié souffrir de douleurs abdominales intenses pendant plusieurs jours.
La recherche conduite par dix-sept médias, y compris Le Monde, et orchestrée par Forbidden Stories démontre encore une fois que le logiciel d’espionnage, qui est officiellement commercialisé pour combattre le crime organisé et le terrorisme, est presque toujours employé à des fins politiques. Anne Rwigara n’est qu’un cas parmi tant d’autres, d’après les données examinées par Le Monde et Forbidden Stories. Les autorités du Rwanda, contactées à ce sujet par Forbidden Stories, n’ont pas réagi. Vous n’avez lu que 33,37% de l’article. Le reste est accessible uniquement aux abonnés.
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