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29 mai 2024 16 h 10 min

« L’engouement mondial pour le bonsaï fait de lui une victime de son propre succès. »

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L’engouement pour la tradition japonaise du bonsaï est en hausse. Ces arbres miniatures, méticuleusement façonnés par le temps et soignés par des artisans détenant une expertise transmise de générations en générations, connaissent un rayonnement mondial. Cependant, leur popularité a aussi conduit à une augmentation inquiétante des vols, qui préoccupent aussi bien les artisans que les autorités japonaises.

« L’industrie est constamment secouée par des vols ces temps-ci. C’est insoutenable », a déclaré Tatsuharu Takeshita de la maison de bonsaïs Koyo-en à Inazawa (centre), à l’agence Kyodo. Il a lui-même perdu quinze de ses bonsaïs lors de deux raids. Les voleurs, opérant principalement la nuit, ont violé le périmètre de sécurité. Certaines des plantes volées appartiennent à des clients de Koyo-en qui les avaient confiées en dépôt pour entretien.

Le 8 mai, trente-trois bonsaïs d’une valeur totale de 18,8 millions de yens (110 200 euros) ont été volés chez Gasho-en. « Ma colère est telle que j’aimerais punir moi-même les voleurs s’ils osent revenir. Mais plus que tout, j’espère que mes arbres seront retrouvés en bonne santé, car un bonsaï est une œuvre d’art qui prend une éternité à créer », a déclaré Yusei Sasaki, le propriétaire de troisième génération de la maison, basée à Mifune, dans le sud-ouest du Japon, qui possède près de cinq cents de ces arbres miniatures.

La pandémie a favorisé les ventes de bonsaïs
L’Association japonaise des producteurs de bonsaïs a recensé vingt-cinq vols dans onze départements depuis février 2023. L’un des bonsaïs dérobés valait, à lui seul, plus de 3 millions de yens.

La coutume des arbres miniatures, communément appelés bonsaï, a vu le jour durant la période Heian au Japon (794-1185). C’est une déclinaison du penjing, une tradition artistique chinoise axée sur la création de paysages naturels miniatures, au fil du temps adoptée par les japonais. Au départ, cette pratique était le privilège d’une élite aristocratique avant de s’étendre peu à peu à d’autres strates de la société.

L’influence du bouddhisme zen s’est alors reflétée dans cet art, avec un penchant pour la simplification et l’austérité. Les moines zen ont alors introduit l’idée de considérer un unique arbre comme la quintessence de l’Univers dans leurs oeuvres. Plus tard, durant l’ère d’Edo (1603-1868), alors que le Japon connaissait une longue période de paix, certains samouraïs se sont tournés vers la culture des bonsaïs pour compléter leurs revenus.

L’art du bonsaï, qui s’articule autour des conifères et des arbres caducs (perdant leurs feuilles à certaines périodes de l’année), a ses différentes écoles, styles et œuvres maîtresses à l’instar de tous les domaines artistiques. Par exemple, Kunio Kobayashi, fondateur du Musée Shunkaen à Tokyo et l’un des plus éminents artistes de bonsaï, est le gardien d’un arbre miniature datant de huit siècles.

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