Malgré deux mois de manifestations intenses et de pressions à l’échelle mondiale, la loi fortement débattue sur l' »influence étrangère » a été finalement approuvée le mardi 28 mai en Géorgie. Comme attendu, le parti au pouvoir, « Rêve Georgien », a annulé le veto présidentiel au Parlement avec 84 votes pour et seulement 4 contre. Des milliers de personnes ont suivi les débats à travers des écrans géants érigés en dehors du bâtiment parlementaire, dans une atmosphère de tension accrue, sous la supervision de forces de sécurité masquées.
Cette date est vouée à marquer l’histoire de cette ancienne république soviétique du Caucase, prise entre un public favorisant l’Europe et un gouvernement pro-russe, qui lutte pour se débarrasser de l’influence de Moscou depuis son indépendance en 1991. Les adversaires du texte ont déjà trouvé un nom pour ce jour : le « Jour de la Trahison ».
Une trahison du peuple géorgien, principalement. Près de 80% des 3,7 millions de citoyens souhaitent rejoindre l’Union européenne (UE), d’après des sondages. Toutefois, Bruxelles a averti que cette loi sur l' »influence étrangère », copiée sur le modèle russe avec pour but de faire taire la société civile et les médias autonomes, va à l’encontre des normes et valeurs européennes. Son approbation freinera l’intégration européenne du pays, seulement cinq mois après avoir obtenu le statut de candidat officiel.
D’après les protestataires, la loi récente représente un manquement à la Constitution de la Géorgie. Selon la Constitution, toutes actions nécessaires sont supposées être mises en œuvre pour garantir l’intégration complète de la Géorgie dans l’UE et l’OTAN. C’est un objectif qui n’a jamais été remis en doute par les dirigeants successifs depuis l’indépendance.
Au cours de trente ans d’indépendance, l’Amérique et l’Europe, en tant que donateurs principaux, ont fourni plusieurs milliards de dollars en aide pour soutenir la transition démocratique et pour rapprocher la Géorgie de l’Occident. Néanmoins, l’adoption de cette loi par le richissime oligarque et dominant politique, Bidzina Ivanichvili, a réorienté radicalement la géopolitique de la Géorgie, en l’éloignant de l’Europe et en pivotant vers la Russie. Ce mouvement s’avère encore plus frappant étant donné que la Russie est considérée comme un adversaire national, occupant 20% du territoire géorgien suite à la guerre de 2008.
Il semble que le gouvernement géorgien, qui impute à l’Occident, à l’opposition locale et à la société civile géorgienne la création d’une révolution et le risque d’entrainer le pays en guerre, se rapproche également de la Chine. Preuve en est, alors qu’un vote avait lieu pour renverser le veto présidentiel, Irakli Kobakhidze, le premier ministre, a salué l’accord de libéralisation des visas avec Pékin annoncé fin février.
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