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25 mai 2024 11 h 12 min

« Panique morale: TikTok, Jeux Vidéo, Jeunesse »

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La Secrétaire d’État à la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, considère les plateformes sociales comme un fléau dévastateur pour la jeunesse. Le premier ministre, Gabriel Attal, est préoccupé par la possibilité que TikTok prenne le pas sur les livres. Sylvain Maillard, responsable des députés Renaissance à l’Assemblée nationale, croit que TikTok s’oriente vers une stratégie de dilution de la pensée critique. Ces derniers mois, des responsables de la majorité présidentielle ont multiplié leurs critiques envers les médias sociaux, TikTok en particulier, l’accusant d’aliéner et d’accoutumer les adolescents.

Bien que la cible soit moderne, le raisonnement n’est pas nouveau. En effet, il peut être retracé jusqu’à la deuxième République. En 1848, les ouvriers de Paris se soulevèrent contre la fermeture des ateliers nationaux lors des « journées de juin », entraînant des milliers de morts. Cependant, pour une faction de la droite traditionnelle, alors dominante à l’Assemblée, la véritable source des émeutes n’était pas uniquement le chômage, mais aussi les romans-feuilletons, notamment Les mystères de Paris (1842-1843) d’Eugène Sue.

Ces romans étaient considérés comme décadents, transgressifs, abrutissants et potentiellement nuisibles tant pour les femmes que pour les jeunes. Accusés de corrompre le public, ils ont subi la censure et ont commencé à disparaître à partir de 1850, suite à l’adoption d’une taxe spécifique par les députés. L’historien Sébastien Hallade explique : « Inquiets de l’impact de la lecture sur les classes traditionnellement « inférieures » du XIXe siècle – ouvriers, femmes et enfants – et établissant un lien entre les thèmes de l’adultère, la défense du divorce, l’incitation à la rébellion et les romans-feuilletons, le parti conservateur a directement pris pour cible les mœurs de ces livres en 1850″.

Indéniablement, il y a une grande différence entre un post sur Instagram et une vidéo TikTok par rapport à un roman d’Eugène Sue ou d’Alexandre Dumas. Néanmoins, ces médias partagent une prédilection marquée pour la dilution d’œuvres prolongées. Il est manifeste que chaque grande avancée technologique dans la distribution d’œuvres et de médias suscite des discours semblables, exprimant des appréhensions que ces nouveautés entraînent des dépendances, une dépréciation ou de mauvaises conduites chez les plus jeunes.

« Lorsqu’une nouvelle culture voit le jour avec une nouvelle génération, il y a presque toujours un conflit culturel et générationnel, » observe Louis Anslow, l’éditeur de Pessimists Archive, un site qui recense les archives de la presse anglo-saxonne critiquant l’apparition de nouvelles technologies et cultures.

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