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Gouvernement Akhannouch au Maroc critiqué

Après la présentation du bilan du gouvernement marocain au Parlement le mercredi 24 avril, l’opposition n’a pas tardé à exprimer ses critiques. Ils ont qualifié le discours du chef du gouvernement Aziz Akhannouch, en fonction depuis les élections législatives de 2021, de « faussetés », « négation de la réalité » et d' »auto-satisfaction exagérée ». Par l’établissement de l’assurance-maladie universelle obligatoire, l’augmentation des salaires, la réforme scolaire publique, la baisse de l’inflation et la réduction du déficit budgétaire, Akhannouch s’est félicité en disant que son équipe a dépassé toutes les attentes.

Cependant, pour Akhannouch, cette présentation n’était qu’une formalité. Il dirige une coalition gouvernementale majoritaire au Parlement, soutenue par deux autres partis et son propre parti, le Rassemblement national des indépendants (RNI). L’opposition, qui compte environ 120 députés sur un total de 395, a peu de poids, surtout parce qu’elle est divisée. Un projet de motion de censure contre le gouvernement, proposé en janvier par l’Union socialiste des forces populaires (USFP), a finalement été abandonné. Un député de l’USFP a exprimé ses regrets, estimant qu’un vote aurait pu être envisagé si un cinquième des députés avait rejoint l’opposition, ce qui était mathématiquement possible, et cela aurait envoyé un signal, même si l’issue était déjà connue.

L’opposition exprime désormais sa rébellion au moyen de lettres ouvertes adressées au Premier ministre. Le mardi 21 mai, le Parti du progrès et du socialisme (PPS) a lancé un appel à Aziz Akhannouch pour qu’il modifie ses stratégies et réalise au moins les engagements mentionnés dans son programme gouvernemental. Le principal problème est l’augmentation du chômage à un taux record de 13,7 % au premier trimestre 2024.

Situation terrible pour les jeunes

Un parlementaire de l’opposition exprime son inquiétude en déclarant que tout ne va pas bien, contrairement aux affirmations du Premier ministre. Bien que Aziz Akhannouch ait déclaré avoir libéré plus de 4,5 milliards de dirhams (418 millions d’euros) pour créer 220 000 emplois, il s’agit uniquement de postes temporaires selon le responsable d’un parti. Ce dernier rappelle un des engagements du président du RNI : créer « au moins un million d’emplois stables » lors de ces cinq années de mandat.

Cela semble irréalisable. Selon le Haut-Commissariat au plan (HCP), le nombre d’emplois stables perdus en 2023 était proche de 160 000, auquel s’ajoute plus de 20 000 emplois supprimés en 2022. Mohamed Benmoussa, économiste et membre du PPS, trouve cela inhabituel car « tous les gouvernements précédents que le Maroc a connu depuis plus de deux décennies ont tous créé des emplois stables au cours de leur mandat. »

La situation préoccupante des jeunes au Maroc est frappante, en particulier. Selon une déclaration du Conseil économique, social et environnemental (CESE) publiée le 8 mai, au cours de l’année 2022, un quart de la population marocaine comprise entre 15 et 24 ans, soit 1,5 million d’individus, était sans emploi, sans éducation et sans formation. De plus, les conditions rurales ne suscitent pas moins d’inquiétude. En raison de la sécheresse continue, on estime qu’environ un million d’emplois ruraux n’ont pas été renouvelés entre 2016 et 2023, comme l’a rapporté le HCP.

Il existe une règle générale au Maroc révèle Rachid Aourraz, cofondateur de l’Institut marocain d’analyse des politiques (MIPA) : le taux de chômage grimpe lors des années de sécheresse. L’économie d’aujourd’hui, cependant, n’est pas en mesure de donner suite à d’autres options dans d’autres industries, ce qui se présente comme une énigme majeure. Il n’y a pas assez d’opportunités pour les travailleurs sans emploi qui sont contraints de migrer vers les grandes villes, car les emplois non spécialisés dans la construction et le tourisme sont insuffisants. Les usines, qui sont extrêmement mécanisées, ne fournissent plus assez de points de vente. L’automobile est le principal secteur d’exportation du Maroc, mais la plus grande usine du groupe Renault en Afrique, située à Tanger, n’emploie que 8 000 personnes.

Le gouvernement est dans l’embarras suite à la publication de statistiques officielles. Il y a eu des interrogations sur la véracité des chiffres du HCP avancées par le ministre de l’Industrie et du Commerce, ainsi que sur le timing de publication par le CESE de son avis, qui a suivi de près son bilan. Un membre de l’opposition a noté que « le gouvernement semble critiquer une institution constitutionnelle et l’administration », y voyant une tentative de discréditer les organismes autonomes.

Les reproches de l’opposition ont également porté sur le taux de croissance. Bien qu’il ait augmenté de 1,3 % à 3,2 % entre 2022 et 2023, il demeure inférieur à l’objectif annuel moyen de 4 % que le chef du gouvernement espérait atteindre durant son mandat. Cependant, Aziz Akhannouch, devant le Parlement, a mis en garde contre une moyenne de 3,8 % par an jusqu’en 2026. Abdelkhalek Touhami, professeur d’économie à l’Université Mohammed VI Polytechnique de Rabat, qualifie cela de vœu pieux et signale la « faiblesse historique » de la production céréalière. La campagne actuelle n’a produit que 30 millions de quintaux, contre 55 millions précédemment. L’agriculture marocaine a connu une année difficile, avec des précipitations très basses, représentant 13 % du PIB.

Le flux net des Investissements Directs Etrangers (IDE) a décroché, chutant de moitié à dix milliards de dirhams en 2023, rapporte l’Office des changes. C’est principalement grâce aux remises des Marocains qui vivent à l’étranger, qui ont atteint un record de 115 milliards de dirhams cette année-là, et aux devises touristiques, qui étaient de 14,5 millions la même année, que le Maroc a pu alléger sa balance des paiements.
L’espoir du gouvernement repose maintenant sur d’importants projets infrastructurels : des installations sportives pour la Coupe du Monde de football en 2030, que le Maroc co-organisera avec l’Espagne et le Portugal ; une autoroute électrique reliant Dakhla, au Sahara occidental, et Casablanca ; des voies ferrées à grande vitesse ; des infrastructures hydrauliques ; des gazoducs, etc. Selon Aziz Akhannouch, ces projets bénéficieront d’un financement colossal, dépassant les « 200 milliards de dirhams ». Cela pourrait apporter une bouffée d’oxygène à l’économie et créer des emplois, selon un député de la majorité, conscient de l’urgence, étant donné que les prochaines élections se profilent dans moins de deux ans.

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