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24 mai 2024 16 h 12 min

« Blocage TikTok en Nouvelle-Calédonie: Première Française »

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Pour la première fois en France et en Europe, l’accès à un réseau social majeur a été bloqué sur le territoire national. Depuis plus d’une semaine en Nouvelle-Calédonie, TikTok est hors de portée à la suite d’une décision du gouvernement. Ce dernier reproche à la plateforme, qui jouit d’une grande popularité parmi les jeunes en Nouvelle-Calédonie comme en métropole, d’avoir favorisé « la diffusion des troubles insurrectionnels à l’ordre public ». Le jeudi 23 mai, une demande de suspension du blocage, déposée par plusieurs organisations de protection des libertés publiques, dont la Ligue des droits de l’homme, la Quadrature du Net, l’association Mouvement Kanak et trois individus a été rejetée par le Conseil d’État. Cependant, cette première victoire juridique pour le gouvernement n’a pas résolu plusieurs questions essentielles.

En effet, le Conseil d’État, une cour administrative, n’a pas donné son avis sur la légitimité de la mesure. Au lieu de cela, il a jugé que les organisations contestant le blocage n’ont pas réussi à prouver une violation flagrante des droits des citoyens de Nouvelle-Calédonie qui justifierait une suspension d’urgence de l’interdiction. Par ailleurs, la justification du blocage est également fortement contestée par les mouvements Kanak et les partisans de la défense des libertés. Ils soutiennent que le gouvernement n’a pas réussi à prouver que TikTok a été impliqué dans l’escalade des violences.

Malgré la diffusion de vidéos d’incendies et de prétendus tirs des forces loyales ou de la police sur les jeunes Kanak sur TikTok, leur présence et leur visibilité étaient plutôt limitées. Des contenus identiques étaient traversés en grande masse sur d’autres plateformes, y compris X ( autrefois Twitter) et Facebook. Viginum, une agence gouvernementale dédiée à la lutte contre les ingérences étrangères, a remarqué que la majorité des activités de désinformation provenant de l’Azerbaïdjan étaient concentrées sur ces deux plates-formes dans le but d’aggraver la situation en Nouvelle-Calédonie. Cependant, ni X ni Facebook n’ont été suspendus.

Des interrogations se posent également sur la manière dont le blocage a été effectué sans discussion ou demande préalable. Lors des émeutes de l’été 2023, déclenchées dans plusieurs villes françaises suite à la mort de Nahel, le président Emmanuel Macron avait suggéré que le gouvernement pourrait avoir le pouvoir de « réguler ou couper » les réseaux sociaux « lorsque les choses dégénèrent ». TikTok et surtout Snapchat étaient accusés d’avoir contribué à l’escalade de violence, en particulier via la fonction « Snap Map » qui permet d’identifier, presque en temps réel, les lieux où de nombreuses vidéos publiques sont publiées par les utilisateurs. Malgré cela, aucune preuve ne suggérait alors ou à ce jour que cette fonction avait joué un rôle crucial dans ces actes de violence. Snapchat a répondu par la mise en place d’une supervision accrue de la « Snap Map » et a renforcé sa modération. Les dirigeants de Snapchat étaient par ailleurs conviés à des réunions avec les ministres de l’intérieur et du numérique, ainsi qu’avec les représentants d’autres réseaux sociaux, afin de discuter des actions à entreprendre.

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