Le 23 mai marque le 75e anniversaire de la Loi fondamentale allemande, survenant environ six mois après le 65e anniversaire de la Constitution française, qui a été célébré le 4 octobre 2023. En ces périodes incertaines pour les démocraties et l’État de droit, ces événements annuels incitent à la réflexion sur la pérennité de nos valeurs essentielles.
Peu de gens auraient parié sur la durabilité de la Loi fondamentale allemande lors de son introduction en 1949. Le mot « constitution » a été délibérément évité pour accentuer le fait qu’il se référait à la constitution de la seule partie ouest de l’Allemagne, élaborée sous la supervision des forces alliées occupantes et sans la contribution directe du peuple. Malgré cela, la tâche restait considérable. Comment ce nouvel ordre constitutionnel pourrait-il contribuer à la renaissance démocratique et libérale après l’éradication du Troisième Reich nazi (1933-1945) ?
La première clause de la nouvelle Constitution sonnait sûrement comme une promesse : « La dignité de la personne humaine est inviolable. Il est du devoir de tous les organes de l’État de la respecter et de la sauvegarder ». Cependant, les leçons du passé incitaient à la circonspection.
Crucial pour l’identité allemande.
Un siècle auparavant, en 1849, l’église Saint-Paul définissait les fondements d’un Etat démocratique par son code constitutionnel, alors que la Constitution de Weimar en 1919 représentait une avancée majeure vers l’actualisation politique et sociale de l’Allemagne basée sur des principes démocratiques, fédéralistes et juridiques. Cependant, le document constitutionnel de 1849 n’a jamais été mis en pratique et celui de 1919 a conduit à un régime autoritaire dès 1930. Aucune garantie n’existe que même une constitution « solide » sera efficace.
Il est dès lors impressionnant de constater que l’indifférence initiale qui a accompagné l’adoption de la Loi fondamentale en 1949 a été progressivement surmontée : le concept de « patriotisme constitutionnel », introduit dans le discours allemand en 1979 par Jürgen Habermas, reflète l’importance de la coutume constitutionnelle pour l’identité allemande – un aspect qui est difficile à trouver en France.
Le consensus autour de la Loi Fondamentale a également joué un rôle déterminant après la démolition du mur de Berlin en 1989, lorsqu’il a été question de rédiger une nouvelle constitution pour la totalité du peuple allemand : en 1990, la Loi fondamentale a simplement été modifiée pour s’appliquer également aux cinq régions de l’Est.
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