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Junte Niger donne quatre mois aux USA

Dans quatre mois, le Niger ne verra plus de troupes américaines sur son sol. C’est la conclusion d’une rencontre entre la junte militaire au pouvoir et une délégation du département d’état américain, tenue à Niamey, la capitale, le dimanche 19 mai. Les mille soldats américains, actuellement en mission anti-djihadiste, ont jusqu’au 15 septembre pour quitter la base d’Agadez, qui sert à des opérations de renseignement et d’antiterrorisme dans le Sahel et le Sahara.

Selon une déclaration conjointe signée par Salifou Modi, ministre nigérien de la défense, et Christopher Maier, secrétaire adjoint américain à la défense chargé des opérations spéciales, l’accord a été conclu en toute transparence et respect mutuel. Cet accord met fin à plusieurs semaines de tension entre les dirigeants américains et la junte militaire au pouvoir au Niger depuis le coup d’état de juillet 2023 qui a renversé le président élu Mohammed Bazoum.

Le 16 mars, Niamey avait brusquement mis fin à un accord de coopération militaire avec les États-Unis, datant de 2012, suite à des pressions jugées inacceptables. Selon une récente interview du Premier ministre nigérien, Ali Mahamane Lamine Zeine, avec le Washington Post, les responsables américains auraient menacé de sanctions si le Niger continuait à vendre une partie de son uranium à l’Iran. Le départ des troupes américaines a été qualifié de « défaite diplomatique ».

Le premier ministre du Niger a indiqué qu’aucun accord n’a été conclu avec l’Iran en ce qui concerne l’uranium. Néanmoins, des sources officielles en occident et au Niger, confirment à Le Monde que des discussions secrètes avec l’Iran ont pris place concernant une livraison de 300 tonnes de yellow cake (un concentré d’uranium).

Conformément à cet accord, les Etats-Unis peuvent garder la tête haute mais ils subissent un échec diplomatique. Ils ont tenté de se dissocier de la France en adoptant une posture plus flexible face au régime nigérien alors que la France se montrait ferme. Malheureusement, ils finissent par se retirer, même s’il y a probablement moins d’amertume qu’avec les Français, analyse Michael Shurkin, directeur de programmes chez 14 North Strategies, une firme de conseil axée sur les problématiques africaines.

La France a été obligée de rappeler son ambassadeur de Niamey et de retirer ses forces militaires du Niger en septembre. Cependant, Washington espérait pouvoir rester sur le terrain en différant de plusieurs semaines l’appel au retour de la légalité constitutionnelle avant de suspendre son aide militaire.

Selon Franklin Nossiter, chercheur à l’International Crisis Group basé à Dakar, « Les États-Unis avaient un double avantage à négocier leur sortie. Premièrement, pour protéger leurs soldats qui devenaient vulnérables car leur base se trouve dans une région isolée. Deuxièmement, pour se prémunir, lors de cette année électorale, contre une attaque qui viserait des militaires américains et qui aurait eu des conséquences catastrophiques pour l’administration Biden. »

La lutte contre le terrorisme semble peu affectée.

Depuis son lancement en 2019, la base d’Agadez aux États-Unis, qui a nécessité un investissement de plus de 100 millions de dollars (92 millions d’euros), a fourni un accès aux drones et avions américains pour effectuer des missions de reconnaissance et d’intelligence dans une zone où de nombreux groupes armés sont présents. L’arrêt de ses opérations soulève des questions sur son impact sur la lutte contre le terrorisme. Cependant, selon Michael Shurkin, cette absence sera minime puisque son principal rôle était de recueillir des informations pour les Français. À la différence des Français, les troupes américaines n’étaient pas impliquées dans des combats sur le terrain depuis l’embuscade de Tongo Tongo, qui a résulté en la mort de quatre militaires en 2017.

Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger est la troisième nation du Sahel dirigée par des militaires qui a mis fin à certains de leurs accords militaires avec leurs alliés occidentaux. Comme ses voisins, avec lesquels il a formé l’Alliance des États du Sahel (AES), Niamey s’est également tourné vers la Russie pour un partenariat. En avril et mai, une centaine d’instructeurs russes se sont installés à la Base Aérienne 101, à proximité de l’aéroport de Niamey. Ils sont là pour former les troupes nigériennes à l’utilisation du système de défense aérienne, en compagnie de leurs homologues américains.

Lors d’une conférence de presse jeudi, le ministre américain de la défense, Lloyd Austin, a déclaré que la présence russe ne constituait pas un « problème important (…) en termes de protection de [leurs] forces ». De plus, Washington envisage progressivement un redéploiement vers les pays côtiers du Golfe de Guinée, qui sont confrontés à des pressions djihadistes à leur frontière avec le Sahel.

Les relations continues entre le Niger et les États-Unis dans le secteur du développement ne sont en rien affectées par le retrait des troupes américaines, selon une déclaration commune publiée dimanche par les deux pays. Le ministère nigérien des affaires étrangères prévoit la signature d’un nouveau pacte de trois ans d’une valeur de 500 millions de dollars pour l’aide au développement.

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