Il y a cinq ans, le plomb de Notre-Dame de Paris s’évaporait en une fine pluie de particules ou fusionnait sur place. Les pompiers et les habitants du quartier se souviennent encore de cette scène, comme tous les habitants de la ville Lumière. Ils ont couru un grave danger. Cinq années plus tard, aucune expérience de retour d’information sur ce « métal enflammé » n’a été partagée. Le poids du plomb récupéré après l’incident n’a jamais été dévoilé.
Les particules de plomb, non biodégradables, continuent à se disperser lentement à travers les différents systèmes écologiques de la région Île-de-France. Leur impact néfaste pourrait persister et affecter plusieurs générations.
Beaucoup espéraient que cet incident suscite une réflexion, une sensibilisation, et au final, conduit à l’arrêt de l’utilisation du plomb dans les travaux de restauration de la cathédrale. Mais rien n’a changé. L’avancement des travaux est plutôt satisfaisant, et dès l’été prochain, de nouveau le plomb recouvrira cette icône de la ville. La situation sera comme avant le drame.
Il y a pourtant des alternatives
Les dirigeants de cette restauration ont ignoré cette réalité tout au long du projet. L’un a prétendu qu’aucune particule de plomb ne s’était dispersée le 15 avril 1979 (Philippe Villeneuve, RTL, 15 octobre 2019). L’autre a loué le plomb comme un « métal précieux » (Jean-Louis Georgelin, France 2, 2022), ou comme un exemple parfait d’ « économie circulaire ». Ces déclarations extravagantes auraient dû susciter des questionnements, mais elles n’ont réussi qu’à susciter l’indifférence du public.
Il est essentiel de faire coïncider la préservation de notre patrimoine culturel et celle de l’environnement. Ces deux idées découlent du même processus intellectuel qui insiste sur la lutte contre la détérioration écologique et la sauvegarde des œuvres humaines notables. Néanmoins, avec le plomb, ces aspirations rentrent en conflit.
S’il est difficile de se débarrasser du plomb, il serait en revanche facile de le remplacer pour les monuments concernés. Plus de la moitié des églises à Paris ainsi que la majorité des cathédrales au nord de la Loire possèdent des toitures en ardoise, pour la plus grande satisfaction de ceux qui les apprécient et la tranquillité d’esprit des individus chargés de leur entretien.
Les défenseurs du plomb n’ont d’autre choix que de se rendre face aux dégâts répétés que cause cette substance. Le plomb de la Notre-Dame, par exemple, n’est pas une préoccupation récente. Eugène Viollet-le-Duc, l’architecte ayant restauré la cathédrale, a dû procéder à la réfection de son toit en plomb, endommagé par l’acide pyroligneux du chêne, à peine dix ans après avoir érigé la flèche. Il fut obligé de répéter l’opération à deux autres reprises par la suite.
Le vaste projet de rénovation qui a débuté début 2019, quinze ans après son délai initial, marquait la troisième tentative de sauver le toit de la flèche. De façon présumée, c’est ce projet qui a causé l’incendie du 15 avril. Ce soir-là, un feu métallique incontrôlable a éclaté, posant un danger considérable pour les pompiers en intervention et les riverains non avertis. L’enlèvement de plomb de l’édifice a retardé d’un an le chantier de restauration suivant. Tout cela pour… remettre du plomb « tel quel » (discours d’Emmanuel Macron du 9 juillet 2020)!
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