Agnès Gautheron, Gabriel Coutagne, Fatoumata Sillah ainsi qu’Audrey Delaporte (photos) ont participé à la diffusion de ce live. Consultez tous nos articles, analyses et reportages sur le conflit en Ukraine publiés sur « Le Monde ».
Un sentiment de désespoir se fait sentir dans la région de Kharkiv, où des milliers d’Ukrainiens évacuent les villages frontaliers avec la Russie. L’incorporation après l’âge de 25 ans est devenue une réalité pour beaucoup qui se battent pour « protéger l’avenir du pays ». Devant un centre de recrutement à Kiev, le sentiment commun est « quelqu’un doit bien porter une arme ».
L’attente des munitions occidentales pèse sur les soldats ukrainiens dans le Donbass, d’autant plus que l’offensive russe sur Kharkiv s’intensifie. Par ailleurs, Kiev demande l’autorisation de Washington d’utiliser des armes américaines pour attaquer le territoire russe. Cependant, la question demeure : l’armée russe réussira-t-elle à percée le front ukrainien ?
La vie quotidienne des soldats ukrainiens dans le Donbass est marquée par l’épreuve : « Il y a des lieux où des attaques russes se produisent chaque jour ».
Pour répondre à vos questions les plus courantes, le recours aux drones par Moscou et Kiev s’est intensifié au cours des derniers mois. Selon un document publié en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé dans les questions de défense, l’Ukraine perd environ 10 000 drones par mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 par jour. À titre de comparaison, l’arsenal français compte un peu plus de 3 000 drones.
Dans les conflits impliquant les ukrainiens et les russes, l’usage prédominant concerne les petits Véhicules Aériens Non-Habités (UAV, en anglais), qui sont principalement d’origine civile, accessible et peu coûteux. Ces appareils sont majoritairement déployés pour l’observation du terrain de guerre, guider les unités militaires ainsi que les tirs d’artillerie. Certains sont également équipés pour transporter des petites quantités d’explosifs, qui sont ensuite largués sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Les drones-kamikazes, bien que moins fréquents, jouent un rôle crucial. Ils sont équipés d’explosifs et sont lancés au-dessus de la ligne de front sans avoir un objectif défini au préalable. Parmi les drones utilisés par Moscou, on retrouve les Lancet-3 russes et les Shahed-136 iraniens. L’Ukraine, qui ne possède pas de flotte navale significative, répond en utilisant des embarcations maritimes téléguidées sans équipage, des sortes de kayaks télécommandés munis d’explosifs (450 kilos de TNT).
L’importance des drones dans leurs opérations militaires a conduit les ukrainiens et les russes à mettre en place des moyens pour alimenter leurs troupes sur le long terme. Ils ne se contentent pas d’acheter des drones civils en gros sur le marché, mais ils développent également leurs propres capacités de production. L’industrie nationale ukrainienne, qui était encore à ses débuts lors du déclenchement de la guerre du Donbass il y a dix ans, a depuis accru sa puissance. En fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé qu’une version du drone russe Lancet a été développée et sera bientôt déployée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.
La Russie est confrontée à des restrictions dues aux sanctions occidentales, qui entravent son approvisionnement en pièces électroniques. Malgré cela, selon des sources du renseignement américain, elle aurait quand même entamé la construction d’une usine destinée à la production de drones-kamikazes de technologie iranienne, tels que les Shahed-136, dans la zone économique spéciale d’Alabouga.
Quant à l’inventaire de missiles russes, obtenir des informations précises est une tâche ardue, voire irréalisable. Bien que les services de renseignements ukrainiens communiquent souvent à ce sujet, leurs évaluations sont souvent remises en question.
Andri Ioussov, représentant des services de renseignement militaire (GUR), a déclaré, selon Liga.net, que l’armée russe avait 2300 missiles balistiques ou de croisière avant le conflit et plus de 900 au commencement de l’année. Il a ajouté que des dizaines de milliers de missiles antiaériens S-300, ayant une portée d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’un ensemble de S-400, une version mise à jour avec une portée triple, figuraient également dans l’inventaire de la Russie. En août, Vadym Skibitsky, le second en commandement du GUR, avait avancé un chiffre de 585 missiles ayant une portée excédant 500 kilomètres.
En ce qui a trait à la capacité de production, elle serait d’une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, selon plusieurs experts. En octobre, le GUR évaluait cette production à 115 unités.
Selon plusieurs sources iraniennes citées par Reuters, la Russie aurait reçu 400 missiles iraniens de type Fateh-110 (d’une portée de 300 à 700 kilomètres) depuis janvier, suite à un accord passé, et continuerait d’en acquérir. Les exacts détails de ses achats de missiles de courte portée en Iran et en Corée du Nord demeurent obscurs. Cependant, entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, 24 missiles, probablement des KN-23 et KN-24 d’une portée d’environ 400 kilomètres, ont été lancés en Ukraine, révèle Andriy Kostin, le procureur général.
Quant à la question des avions de chasse F-16, en août 2023, les États-Unis ont acquiescé à une demande de longue date du président ukrainien d’en transférer à son pays. Plus de 300 avions de ce type se trouvent dans neuf pays européens dont la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal. Cependant, tous ces pays ne sont pas prêts à les ceder immédiatement.
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, affirme que les alliés occidentaux ont promis 42 F-16 à Kiev, mais cette affirmation n’a pas été vérifiée. Le Danemark s’est engagé à fournir 19 unités. Les livraisons sont prévues pour se faire progressivement, avec la première tranche de six avions prévue pour la fin de l’année 2023, puis huit supplémentaires en 2024 et le reste en 2025, selon la première ministre danoise, Mette Frederiksen. Les Pays-Bas ont également promis des avions, mais n’ont pas donné de précision sur leur nombre.
En outre, les aviateurs ukrainiens doivent recevoir une instruction pour manœuvrer les jets de combats états-uniens. Onze alliés de l’Ukraine se sont proposés pour s’occuper de l’entraînement des pilotes. L’OTAN a prédit que les militaires ukrainiens ne seront aptes à manipuler ces avions dans un contexte de bataille que vers le début de 2024, tandis que d’autres experts tablent sur l’été de la même année.
Quelle est l’aide militaire que les alliés apportent à Kiev ?
Deux années après le commencement de la guerre à grande échelle, l’élan du soutien occidental à Kiev est en diminution : les assistances récemment engagées durant la période d’août 2023 à janvier 2024 ont diminué en comparaison à la même période de l’année précédente, d’après le dernier bilan de l’institut Kiel, dévoilé en février 2024. Et cette inclination pourrait se maintenir, le Sénat américain ayant du mal à approuver des aides, et l’Union européenne (UE) ayant rencontré des obstacles à l’adoption d’un soutien de 50 milliards le 1er février 2024, à cause du blocus hongrois. Il est à souligner que ces deux tranches d’aides ne sont pas encore comptabilisées dans le dernier rapport de l’Institut Kiel qui s’arrête en janvier 2024.
Les données de l’institut allemand suggèrent que le nombre de bailleurs de fonds se réduit et se recentre autour d’un ensemble de nations : les Etats-Unis, l’Allemagne, les pays nordiques et de l’est de l’Europe, qui proposent à la fois une assistance financière conséquente et de l’armement moderne. En totalité, depuis février 2022, les pays soutenant Kiev se sont engagés pour un montant d’au moins 276 milliards d’euros sur le plan militaire, financier ou humanitaire.
En termes absolus, les nations les plus prospères se sont révélées être les plus libérales en matière de dons. Les États-Unis restent les principaux contributeurs avec une aide déclarée dépassant 75 milliards d’euros, dont 46.3 milliards sont dédiés à l’assistance militaire. Les pays de l’Union européenne ont promis à la fois des aides bilatérales (64.86 milliards d’euros) et des aides multilatérales à partir des fonds de l’Union européenne (93.25 milliards d’euros), totalisant 158.1 milliards d’euros.
Néanmoins, quand ces sommes sont comparées au produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, le classement change. Les États-Unis tombent au vingtième rang (0,32 % de leur PIB), bien après des pays qui sont voisins de l’Ukraine ou d’anciennes républiques soviétiques alliées. L’Estonie est en tête du classement en terme de dons en proportion de son PIB avec 3,55 %, suivie par le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %). La Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %) complètent le top 5. Les trois pays baltes, partageant tous des frontières avec la Russie ou son alliée la Biélorussie, sont parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.
Dans le classement basé sur le pourcentage du PIB, la France se trouve en vingt-septième position, ayant engagé seulement 0,07 % de son PIB, juste après la Grèce (0,09 %). L’aide de la France a diminué constamment depuis le début de l’invasion ukrainienne par la Russie – La France était vingt-quatrième en avril 2023, et treizième à l’été 2022.
Quelles informations avons-nous concernant les tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne?
Les tensions entre l’Ukraine et la Pologne ont redoublé d’intensité ces derniers mois, l’objet central du conflit étant le transport de grains en provenance d’Ukraine. En 2022, la Commission européenne avait institué des « chemins de solidarité » pour faciliter l’expédition et la commercialisation de produits agricoles ukrainiens sans frais de douane, à destination de l’Afrique et du Moyen-Orient. Toutefois, la Fondation Farm – un groupe de réflexion sur les problématiques agricoles mondiales – affirme qu’environ la moitié des grains ukrainiens traversent ou terminent leur voyage au sein de l’Union européenne (UE), affichant un coût nettement inférieur au blé produit au sein de l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.
Ainsi, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie – alléguant que ces grains ont un impact déstabilisateur sur le marché local et, par conséquent, sur les revenus de leurs agriculteurs – ont fait le choix de bloquer unilatéralement leurs importations en avril 2023. Malgré cela, Bruxelles avait autorisé cet embargo, à condition qu’il ne mette pas entrave au transit vers d’autres pays et qu’il ne dure que quatre mois. Cependant, la Pologne a choisi de maintenir ses frontières fermées aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été, malgré le fait que Bruxelles estime que l’embargo n’était plus justifié, déclarant que ses analyses prouvaient qu’il n’y avait plus de distorsion des marchés nationaux pour les céréales.
Les protestataires agricoles en Pologne ont établi un barrage à la frontière polono-ukrainienne, empêchant l’accès des camions en provenance de l’Ukraine. Leur demande est simple : un embargo total sur les denrées alimentaires et produits agricoles ukrainiens. Ils attribuent leur action à l’augmentation massive de leurs coûts de production, alors que les prix sont au plus bas et que les stocks sont pleins dans les silos et entrepôts. Le dirigeant ukrainien a noté en début d’année 2024 que ce blocus frontalier indiquait une perte de solidarité envers l’Ukraine, pour laquelle il a demandé un dialogue avec la Pologne. Selon lui, seule la Russie tire profit de cette situation, constatant même la présence de slogans pro-Poutine parmi les protestataires.
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