Lors d’une récente consultation par téléphone et WhatsApp, le rabbin de Rouen, Chmouel Lubecki, a consacré du temps à rassurer et informer une communauté juive profondément chamboulée. Ce dernier, habitant en face de la synagogue, n’était pas sur les lieux lors de l’acte d’incendie volontaire. « Cependant, il relate que son épouse était là, surprise et encore émue par l’incident. Elle a pu constater la fumée s’échappant de la synagogue, sans voir l’agresseur.
Le lieu de culte est un imposant bloc de béton gris érigé en 1950, se tenant au milieu de bâtiments médiévaux dans la rue des Bons-Enfants et à une faible distance de la renommée place du Vieux-Marché, dans le cœur historique du centre-ville. Aux aurores, vers 6h45, un individu – un algérien en situation irrégulière – a lancé un engin incendiaire à l’intérieur de l’édifice. Muni d’un couteau et d’une barre de fer, il a essayé s’en prendre aux forces de l’ordre avant d’être neutralisé.
Les pompiers ont réussi à rapidement contrôler l’avancée du feu et aucun dégât visible n’est présent sur les murs extérieurs du lieu de culte. « Les dégâts à l’intérieur, cependant, sont significatifs », déplore Chmouel Lubecki. Il souligne toutefois que les livres et rouleaux de la Torah ont été épargnés, contrairement à la Bimah, l’estrade où se fait la lecture de la Torah, qui a été partiellement incendiée. « La disgrâce a de nouveau frappé. », déplore-t-il.
Depuis l’attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, la surveillance autour des synagogues françaises a intensifié, selon Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur. Il s’est rendu sur les lieux l’après-midi même et a observé à part quelques crachats sur la porte de la synagogue, aucun signe particulier au cours des derniers mois n’aurait pu présager un tel événement, d’après le rabbin Lubecki.
Rouen, une ville de 110 000 résidents, abrite environ 200 familles juives, soit un total d’à peu près 1 000 personnes. Le vendredi 17 mai, plusieurs centaines de personnes se sont unies devant l’hôtel de ville de Rouen à 18 heures, répondant à l’appel du maire socialiste, Nicolas Mayer-Rossignol. Entouré par les membres de son parti de gauche et l’opposition de droite, il a proclamé : « L’acte odieux a frappé. Attaquer une synagogue, c’est s’attaquer aux Juifs, c’est donc s’attaquer à nous tous, à la République ».
Une femme de 40 ans, Kristell a participé à la manifestation, exprimant sa solidarité avec la communauté juive. Selon elle, cette attaque symbolique s’ajoute au meurtre du père Hamel, la victime d’une attaque terroriste islamiste en 2016 à Saint-Etienne-du-Rouvray. Marco, un septuagénaire de confession juive, qui a gardé son anonymat, a aussi participé au rassemblement : « Encore une fois, on dira que c’est exceptionnel. Encore une fois, on laissera passer… »