Sébastien Stenger, détenteur d’un diplôme de HEC, a écrit le livre « Au coeur des cabinets d’audit et de conseil. De la distinction à la soumission » (PUF, 2017), dans lequel il évalue les pratiques élitistes des Big Four (Deloitte, EY, PwC et KPMG), les quatre leaders mondiaux du conseil et de l’audit. Bien qu’il admette la hausse de la concurrence venant de secteurs tels que la technologie et la finance pour attirer les diplômés d’écoles prestigieuses, il maintient que le conseil demeure un choix de carrière populaire et prometteur.
Il est évident que les entreprises d’audit et de conseil multiplient les stratégies pour séduire et fidéliser les jeunes diplômés. Pour autant, sont-ils vraiment en train de perdre de leur dynamisme ?
Stenger pense qu’il faudrait nuancer ce « désintérêt ». Des prises de position très visibles de « déserteurs » d’AgroParisTech, HEC Paris ou Centrale Nantes pourraient suggérer un changement chez les nouvelles générations. Néanmoins, si on étudie les statistiques, on remarque une constance dans les choix de carrière des diplômés des grandes écoles de commerce et d’ingénieurs. D’après l’étude annuelle de la Conférence des grandes écoles, un modèle émerge : entre un quart et un tiers de ces diplômés optent pour le conseil, une proportion qui reste stable.
Bien que les jeunes défendent fermement leurs convictions (écologiques, sociales, etc.), cela n’influence pas significativement leur premier choix d’emploi. Le nombre de ceux qui choisissent de travailler dans le secteur associatif, l’économie sociale et solidaire, ou le service public est relativement faible. En guise d’exemple, les grands cabinets de conseil se trouvent souvent à la tête du classement Universum des entreprises préférées des étudiants, chaque année. Il existe certes une recherche de sens, mais en pratique, cela ne conduit pas réellement les jeunes diplômés à se désengager du secteur du conseil. Lorsqu’ils terminent leur parcours scolaire, leur priorité est leur carrière future et leur salaire.
Pourquoi optent-ils pour ce chemin?
Les cabinets de consultance constituent toujours une voie privilégiée pour la formation des leaders économiques de demain. Pour les diplômés des écoles de commerce et d’ingénieurs, faire ses armes pendant quelques années dans un cabinet de conseil est comparable à un troisième cycle universitaire, similaire à une résidence pour les étudiants en médecine. C’est une étape fondamentale qui leur permet d’augmenter leur valeur sur le marché du travail et de propulser leur carrière en avant, en assimilant les codes du monde des affaires et en établissant des connexions pour l’avenir. L’objectif de leur entrée dans un cabinet n’est pas nécessairement de devenir associé, mais plutôt d’acquérir un capital symbolique et culturel, ainsi que des connaissances qui leur offrent une crédibilité et une reconnaissance auprès de leurs pairs, leur permettant ainsi d’accéder à des postes supérieurs au sein des grandes entreprises.
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