Depuis 2021, Jayati Ghosh est une experte en développement, mondialisation et économie des pays en développement, enseignant l’économie à l’Université du Massachusetts, aux États-Unis, après avoir passé près de 35 ans à l’Université Jawaharlal Nehru à New Delhi. Au fil des ans, elle a été consultante pour divers gouvernements et institutions des Nations Unies, et a écrit de nombreux livres. En 2022, son œuvre « The Making of a Catastrophe » (« La création d’une catastrophe », Rupa Publications, non traduite), a exploré comment les décisions prises par New Delhi pendant la pandémie de Covid-19 ont conduit à des conséquences dévastatrices pour le travail des femmes et ont renforcé les inégalités sociales. Elle observe que le pays ne s’est toujours pas remis, tandis que l’économie est affaiblie par les dérives autoritaires du Premier ministre nationaliste, Narendra Modi.
On dit que l’Inde a l’un des taux de croissance les plus rapides au monde, avec un taux annuel de 6 à 7 %. Cela pourrait propulser le pays à la troisième place de l’économie mondiale. Cependant, selon Ghosh, ces chiffres pourraient ne pas refléter fidèlement l’état réel de l’économie indienne.
Les gros titres des médias donnent l’image d’une économie indienne florissante. En effet, l’économie indienne est stimulée par une démographie favorable et un niveau de développement initial relativement faible. Cependant, cette croissance est très disparate, n’affectant qu’une petite portion de la population, sans créer d’emplois stables et solides, et sans fournir de services publics essentiels. De plus, pour la majorité de la population, les indicateurs de santé et de nutrition sont encore nettement inférieurs à ceux de la plupart des pays du monde, y compris ceux avec des revenus par habitant plus bas. Alors, qui bénéficie vraiment de cette croissance ?
L’accroissement de la richesse ne bénéficie principalement qu’à une minorité de la population, soit 10 à 15 %, composée des individus les plus aisés. Cette disproportion résulte en partie d’un trajet de croissance fondé sur un schéma défectueux, généralement appelé « capitalisme copinage », qui favorise en grande mesure les corporates. De ce fait, au fil des trois dernières décennies, une panoplie d’incitations a été offerte aux grandes entreprises par les différents gouvernements : dérèglementation, diminution des inspections environnementales, accès privilégié aux ressources naturelles à un coût réduit, subventions diverses et allègement fiscal.
Quel est l’impact de ces privilèges octroyés aux grandes entreprises sur les autres domaines ?
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