Découvrez tous nos récits, examens détaillés et articles concernant le conflit en Ukraine. Les observations, évaluations et explications du « Monde ». Le voyage tortueux des familles ukrainiennes évacuées de l’enclave palestinienne, de la guerre de Gaza à la violence d’Odessa. À l’occasion des commémorations du 9 mai, Vladimir Poutine critique l’Occident pour engendrer continuellement des tensions. « L’avenir se joue à Kyiv », par Karl Schlögel: l’Europe redécouverte. Mariia Vysochanska, l’Ukrainienne qui porte avec elle la flamme et l’espoir pour Paris 2024. Vladimir Poutine est le principal triomphateur de la guerre de Gaza, selon les raisons citées. La bataille prolongée contre les abus sexuels subis par les femmes ukrainiennes, des survivantes dans un pays où le viol est interdit. Nous répondrons à vos interrogations les plus courantes.
Comment les Russes et les Ukrainiens recourent-ils aux drones ? Depuis quelque temps, le conflit des drones entre la Russie et l’Ukraine s’est intensifié. Selon un rapport diffusé en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé en matière de défense, les Ukrainiens perdaient approximativement 10 000 drones tous les mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 chaque jour. En comparaison, l’armée française n’a que légèrement plus de 3 000 avions non pilotés en stock. Ukrainiens et Russes font essentiellement appel à de petits UAVs (unmanned aerial vehicle, en anglais), des vehicles aériens civils, bon marché et disponibles en grande quantité. Ils sont principalement utilisés pour l’observation du champ de bataille et pour orienter les soldats ou les tirs d’artillerie. Certains sont même adaptés pour transporter des charges explosives de petite taille, qui sont ensuite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Les drones-kamikazes, bien qu’en moindre nombre, jouent une part cruciale. Ceux-ci, chargés d’explosifs, sont libérés au-dessus du champ de bataille sans aucune cible préétablie. Le Lancet-3 russe et le Shahed-136 iranien font partie des drones utilisés par Moscou. En l’absence d’une flotte de guerre, l’Ukraine réplique avec des navires autonomes, des petits kayaks pilotés à distance et bourrés d’explosifs (450 kilos de TNT).
Admettant l’importance des drones dans leurs opérations, tant Ukrainiens que Russes ont mis en place des systèmes pour assurer un soutien continu en faisant un achat massif de drones civils et en développant une production locale. Dix ans après le début de la guerre du Donbass, l’industrie ukrainienne a réussi à évoluer. Le ministre ukrainien de la transformation numérique a révélé en août dernier que la réplique du drone russe Lancet serait lancée sous l’appellation Peroun, nom d’une divinité slave de la foudre et du tonnerre.
Limitée par les sanctions occidentales qui restreignent l’accès à des composants électroniques, la Russie a tout de même débuté la construction d’une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga dédiée à la production de drones-kamikazes inspirés de la technologie iranienne, comme le Shahed-136.
La question des stocks de missiles russes reste complexe. Il est extrêmement difficile, voire impossible, de connaître l’état réel des réserves de missiles de l’armée russe. Les services de renseignement ukrainiens délivrent fréquemment des informations à ce sujet, mais leur fiabilité reste douteuse.
D’après les déclarations d’Andri Ioussov, représentant des renseignements généraux du ministère de la défense (GUR), mentionnées sur Liga.net, l’armée russe possédait initialement 2 300 missiles balistiques ou de croisière avant le déclenchement de la guerre, le nombre dépassait encore 900 en début d’année. De plus, le porte-parole note que ce stock inclut des milliers de missiles anti-aériens S-300, capable d’atteindre des cibles jusqu’à 120 kilomètres, ainsi qu’une grande quantité de S-400, une version plus avancée avec une portée triplée. Vadym Skibitsky, deuxième dirigeant du GUR, a révélé en août que le stock comprend 585 missiles dont la portée dépasse 500 kilomètres.
En ce qui concerne les capacités de production, elles auraient augmenté à environ 100 missiles balistiques ou de croisière chaque mois, selon différents experts. Le GUR estimait cette production à 115 unités en octobre.
Il semble également que la Russie ait acquis des missiles à courte portée en Iran et en Corée du Nord et continuerait à le faire. D’après l’agence Reuters, se basant sur plusieurs sources iraniennes, la Russie aurait reçu 400 missiles iraniens Fateh-110 (portée de 300 à 700 kilomètres) depuis janvier, suite à un accord. Le nombre exact de missiles nord-coréens obtenus par la Russie reste incertain, mais il semblerait que 24 aient été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, comme le précise le procureur général, Andriy Kostin. Selon les experts en charge de l’étude des décombres et des trajectoires, il est probable qu’il s’agisse des missiles KN-23 et KN-24, d’une portée autour de 400 kilomètres.
Et qu’en est-il des avions de combat F-16 ?
En réponse à une requête de longue date du président ukrainien, les États-Unis ont, en août 2023, consenti à la cession des avions de combat F-16 à l’Ukraine. Bien qu’il y ait plus de 300 F-16 répartis dans neuf pays européens – tels que la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal –, tous ces pays n’ont pas la capacité de les transférer immédiatement.
Volodymyr Zelensky avait mentionné un chiffre de 42 F-16 offerts à Kiev par les alliés de l’Ouest, mais cette information n’a pas été validée. Le Danemark a promis d’en livrer 19. Les 6 premiers ne devaient pas arriver avant la fin de 2023, 8 suivront en 2024 et 5 en 2025, comme l’a annoncé la Première ministre danoise, Mette Frederiksen. Les Pays-Bas, qui en ont également promis, disposent de 42 unités, mais ils n’ont pas donné des détails sur combien ils envisagent de céder.
En sus, les pilotes ukrainiens doivent recevoir une formation pour manœuvrer ces avions de combat américains. Onze pays alliés à Kiev se sont engagés à former les pilotes. Selon l’OTAN, les soldats ukrainiens ne seraient aptes à utiliser les avions en combat qu’au début de 2024, tandis que d’autres experts prédisent plutôt l’été de la même année.
Quel est alors le niveau de soutien militaire fourni à Kiev par ses alliés ?
Deux années se sont écoulées depuis que la guerre à grande échelle a débuté, et l’appui occidental à Kiev semble en pleine décadence. De nouveaux engagements d’aide ont subi une diminution entre août 2023 et janvier 2024 en comparaison à l’année précédente. Ceci est confirmé par le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en février 2024. Cette tendance pourrait se maintenir avec l’incapacité du Sénat américain à approuver des aides et les difficultés auxquelles l’Union européenne (UE) a été confrontée pour faire approuver une aide de 50 milliards le 1er février 2024, en raison de l’obstacle hongrois. Il convient de mentionner que ces deux paquets d’aide ne sont pas inclus dans le dernier rapport de l’Institut Kiel qui s’est arrêté en janvier 2024.
Le rapport de l’Institut allemand révèle un rétrécissement et une centralisation du nombre de donateurs autour d’un groupe de pays, principalement les Etats-Unis, l’Allemagne, les pays du nord et de l’est de l’Europe, qui offrent simultanément une aide financière importante et une technologie militaire de pointe. Depuis février 2022, les pays soutenant Kiev se sont engagés à fournir au moins 276 milliards d’euros en termes d’aide militaire, financière ou humanitaire.
En termes absolus, les pays les plus riches ont été les plus généreux. Les États-Unis sont les donateurs les plus généreux, avec plus de 75 milliards d’euros d’aide annoncée, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les pays de l’Union européenne ont annoncé à la fois des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides communes tirées des fonds de l’Union européenne (93,25 milliards d’euros), pour un total de 158,1 milliards d’euros.
L’évaluation des contributions des pays en fonction de leur produit intérieur brut (PIB) donne une perspective différente. Par exemple, les États-Unis se classent vingtièmes sur cet index, avec seulement 0,32% de leur PIB alloué. Ils sont devancés par les pays limitrophes de l’Ukraine et d’anciennes nations soviétiques allies. Au sommet de ce classement se trouve l’Estonie en consacrant 3,55% de leur PIB, suivie par le Danemark (2,41%) et la Norvège (1,72%). Les deux dernières places du top 5 sont occupées par la Lituanie (1,54%) et la Lettonie (1,15%). Ces trois pays baltes, qui partagent tous une frontière avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, sont parmi les donateurs les plus généreux depuis l’apparition du conflit.
Quant à la France, elle est située à la vingt-septième place du classement, engageant seulement 0,07% de son PIB, légèrement derrière la Grèce (0,09%). L’aide apportée par la France a continuellement diminué depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. En effet, en avril 2023, la France se classait vingt-quatrième et en été 2022, elle était treizième.
Les tensions actuelles entre l’Ukraine et la Pologne à la frontière sont un autre sujet à prendre en compte.
Les mois passés ont vu des tensions croissantes entre l’Ukraine et la Pologne, principalement dues au transit de céréales ukrainiennes. Au printemps 2022, des « voies de solidarité » ont été mises en place par la Commission européenne pour favoriser l’exportation et la commercialisation, sans taxes douanières, de produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Toutefois, selon la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les enjeux agricoles mondiaux, presque la moitié des céréales ukrainiennes transitent ou finissent leur voyage au sein de l’Union européenne (UE). Ces céréales sont proposées à un prix nettement inférieur à celui du blé cultivé en UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.
La Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont tous argué que ces céréales déstabilisent leur marché local, ainsi que le revenu de leurs agriculteurs, et ont donc décidé de bloquer unilatéralement leurs importations en avril 2023. Cet embargo a été accepté par Bruxelles à la condition qu’il ne freine pas le transit vers d’autres pays et qu’il n’excède pas une durée de quatre mois. Cependant, à la fin de l’été, Varsovie a choisi de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes, arguant que le problème de base n’avait pas été résolu. Cette décision s’est faite malgré le fait que Bruxelles considère que l’embargo n’a plus lieu d’être suite à des analyses montrant qu’il n’y a plus de distorsion des marchés nationaux pour les céréales.
Les fermiers de Pologne ont établi un blocus à la frontière avec l’Ukraine afin d’interdire l’accès des véhicules ukrainiens à leur nation, exigeant une interdiction totale sur les marchandises agricoles et nourriture ukrainienne. Ils protestent contre l’augmentation importante de leurs frais de production tandis que les sites de stockage et les silos sont remplis à ras bord et que les tarifs sont extrêmement bas. Le chef d’état ukrainien avait déclaré en début 2024 que le blocus à la frontière polonaise démontrait une diminution de la solidarité envers son pays, demandant des discussions avec la Pologne. Il a également déclaré que seul Moscou se réjouissait de ces conflits, critiquant la naissance de mots d’ordre visiblement en faveur de Poutine.
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