Abano Terme voit la tombée du soir. Dans cette cité thermale vénitienne, l’intersaison s’accroche et les avenues peuplées de vastes hôtels aux formes cubiques se trouvent désertées. Pourtant, deux vans de police stationnent devant le théâtre Pietro d’Abano. Bientôt, un postulant singulier aux élections européennes fera face à une audience prête à l’acclamer. Le général Roberto Vannacci, 55 ans, sensation médiatique et icône de l’extrême-droite, est en pleine campagne électorale.
Pour tenter de freiner sa chute dans les sondages, la Ligue (extrême-droite) a positionné le général comme principal candidat dans deux districts. La loi italienne permet aux membres de l’armée de se présenter aux élections, du moment qu’ils ne mènent pas campagne en uniforme. Lors de sa dernière apparition publique à Naples, des manifestants de gauche se sont confrontés aux forces de l’ordre désormais chargées de la sécurisation de ses meetings, lui donnant l’occasion de se déclarer une fois de plus attaqué dans son droit à la liberté d’expression.
Dans la salle, exiguë mais bondée, l’entrée du militaire revêtu d’un blazer et d’une chemise rayée suscite des applaudissements fournis. Les spectateurs ont payé 15 euros pour assister à la présentation de son dernier ouvrage, Il corraggio vince (« le courage triomphe », Piemme, non traduit). Avançant tranquillement vers la scène avec un léger sourire et un regard bienveillant mais pénétrant, le général est là pour transmettre son message: « Etre normal aujourd’hui, c’est être révolutionnaire. »
Être normal selon le général, implique d’être blanc, hétérosexuel, et propriétaire d’un véhicule à combustion interne. Il ressent une pression énorme émanant d’une pieuvre invisible mais puissante. Cette dernière regroupe notamment : la correction politique, le lobby homosexuel, les féministes radicales, la culture de l’annulation, l’idéologie éveillée, et surtout, l’idéologie verte. Pour lui, ces mouvements conjoignent leurs forces pour accomplir « la destruction de l’Occident », une mission continuée par les penseurs bienveillants où les marxistes ont échoué.
Accusations de Racisme et d’Homophobie
Son premier ouvrage, Il mondo a contrario (« le monde à l’envers », qui n’a pas été traduit), a été auto-publié en août 2023 alors qu’il était encore méconnu. Cela lui a valu des allégations de racisme et d’homophobie. Par la suite, une presse nationale hostile à son égard a suscité une publicité bienvenue. Cette publicité a entraîné quelques jours de débats, marqués par la désapprobation du ministre de la défense, Guido Crosetto. Ces événements ont conduit à des ventes massives de son livre qui a atteint des centaines de milliers d’exemplaires et l’ont propulsé sous les feux des projecteurs et sur les routes du pays. Depuis lors, chacune de ses déclarations attire l’attention, fait l’objet de contestations et est relayée presque quotidiennement.
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