Catégories: Actualité
|
14 mai 2024 10 h 11 min

« Procès TGV Est: Réquisitoire dénonce aveuglement »

Partager

Au début du mois de mai, lors des audiences devant le tribunal correctionnel de Paris, le père d’une des victimes de l’accident de TGV Est en 2015 avait résumé l’attitude des six accusés d’une phrase simple : « Ce n’est pas ma faute, c’est celle de l’autre ». Tous se sont accusés mutuellement, incluant le conducteur du TGV, Denis T., son collègue Francis L., qui était chargé de lui indiquer les points de freinage, ainsi que les représentants des deux entreprises principales impliquées dans l’essai, la SNCF et sa filiale Systra.

Face à ce refus constant d’admettre la responsabilité pour les victimes, le procureur Nicolas Hennebelle a répondu le 13 mai avec des accusations de culpabilité quasi générale en insistant que l’accident est le résultat d’un « aveuglement collectif ».

Selon lui, alors que les essais devaient assurer la sécurité des futurs trajets commerciaux sur la nouvelle ligne reliant Paris à Strasbourg, tout semble avoir été fait pour mettre en danger la conduite du train. Au cours d’un monologue de quatre heures, il a énuméré une liste de « décisions insensées » qui ont conduit à la tragédie.

Ces décisions ne sont pas le fait d’un seul individu ou d’une seule organisation. Le procureur indique que le fait de vouloir diminuer le dossier à l’erreur unique d’un individu ou d’une entité sert seulement à masquer les manques organisationnels de ce projet. De même, il fait valoir que l’accident ne peut se résumer uniquement à une mauvaise gestion, excluant les individus de toute responsabilité.

Le procureur a conclu que les événements dramatiques du 14 novembre 2015 étaient liés autant aux actions qui ont eu lieu dans la cabine du TGV qu’aux décisions prises dans les bureaux de la SNCF et de ses filiales. Il a plaidé pour que le tribunal juge cinq des six accusés coupables d’homicides et de blessures non intentionnels. Pour lui, Philippe B., dont le rôle était d’alerter le conducteur sur les caractéristiques de la voie (pente, etc.), n’était pas impliqué dans la décision d’un point d’arrêt trop tardif près d’un virage serré, qui fut l’unique cause de l’accident entrainant 11 décès et 42 blessés.

Le travail de déterminer la tactique de freinage a été laissé à Francis L. Selon Nicolas Hennebelle, son « manque de précision » a conduit à choisir un point de freinage « sans aucune marge de sécurité », décidé « sans calculs scientifiques, aucune évaluation fiable et sans compétences appropriées ». Francis L. a dit avoir travaillé sur cette décision « à partir de son expérience », pendant que le conducteur du train a décrit cette méthode comme étant du « pifomètre » . Le conducteur est également jugé responsable par le procureur, qui a souligné qu’il avait explicitement approuvé le point de freinage, il avait même suggéré de décaler l’arrêt d’un kilomètre, pensant disposer d’une marge suffisante. Cela a été jugé comme une « faute d’évaluation flagrante » et une « négligence importante ».

Il reste encore 39.54% de cet article à lire, qui est accessible uniquement pour les abonnés.