Quand Lucie (qui a choisi de garder son anonymat) révèle qu’elle est mère de trois enfants, elle reconnaît que cela diffère de la norme. Elle ressent la même chose lorsque les cinq membres de sa famille arrivent dans les restaurants, qui semblent souvent surpris. Les réactions, cependant, ne sont pas nécessairement négatives, elles sont surtout stupéfaites et parfois même admiratives, dit-elle en riant. Quitter leur appartement parisien a été une étape clé pour la professeure et son conjoint dans leur décision d’avoir un troisième enfant. Après la pandémie de Covid-19, ils ont déménagé dans le sud de la France pour être plus près de leurs familles, ont acheté une maison et Lucie a obtenu un poste permanent dans une école près de chez eux — trois conditions sans lesquelles ils n’auraient pas fait le « grand saut », selon cette mère de trois enfants de 36 ans, dont le mari est fréquemment en déplacement.
En 2020, selon les derniers chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), les familles vivant chez elles avec deux enfants — dont au moins un mineur — étaient les plus fréquentes (42,4%), suivies de celles avec un seul enfant (36,2%) . Cela inclut les familles « traditionnelles » (où les enfants ont les mêmes parents), les familles « monoparentales » et les familles « recomposées ». Les familles nombreuses, quant à elles, constituaient une famille sur cinq, la majorité ayant trois enfants (15,7%), et moins fréquemment quatre ou plus (5,7%).
Selon l’État, l’écart entre les familles commence à se creuser à partir du troisième enfant : le congé postnatal est presque doublé, une part fiscale additionnelle est accordée, les allocations familiales sont multipliées par deux… Les bénéfices sociaux et fiscaux augmentent significativement, tout comme les dépenses liées à l’arrivée d’un nouvel enfant. Les mots utilisés dans les témoignages recueillis par Le Monde sont très parlants : « franchir le pas », « se lancer », « passer le cap »… On retrouve aussi l’idée d’un enfant « bonus » par rapport à la norme familiale, qui pourrait ne pas être nécessairement « raisonnable » : « fantaisie ou cerise sur le gâteau? »
« Une décision de vie authentique »
Alors que la natalité en France est en baisse, le Président de la République, Emmanuel Macron, a annoncé en janvier des initiatives pour « reconstituer la démographie » du pays. Qu’est-ce qui fait qu’une famille décide de s’écarter du modèle dominant ou, au contraire, de s’y conformer ? Les mêmes interrogations sont-elles présentes pour les deux premiers enfants que pour le troisième ?
Il reste 67.92% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
Laisser un commentaire