Plusieurs milliers de citoyens géorgiens se sont réunis devant le Parlement à Tbilissi le dimanche 12 mai, afin de manifester leur opposition à une proposition de loi visant à limiter « l’influence étrangère », inspirée par la Russie, ignorants ainsi les mises en garde et admonestations du gouvernement. Les étudiants de diverses universités de la ville ont également déclaré leur intention de faire grève le lendemain, le lundi.
Au cours de la même journée, le gouvernement avait menacé de poursuites judiciaires tous ceux qui essaieraient d’empêcher le vote de la loi par le Parlement. Le Premier ministre, Irakli Kobakhidze, a tenu à souligner que les membres des groupes d’opposition radicaux seraient tenus responsables de leurs actes violents devant la loi. De manière plus précise encore, le ministre de l’Intérieur, Vakhtang Gomelauri, a averti : « Bloquer collectivement un objet d’une importance particulière est passible d’une peine d’emprisonnement allant jusqu’à quatre ans. » Il a ensuite ajouté que cet article de loi serait utilisé sans exception contre ceux qui enfreignent la loi. Les autorités ont dépeint les manifestants, principalement des jeunes, comme des groupes violents.
La présidente de la Géorgie, Salomé Zourabichvili, favorable à l’Union européenne et en désaccord avec le gouvernement, a exhorté les manifestants à rester prudents. «Je m’adresse à vous, manifestants, pour que vous sachiez qu’il y a des projets qui ne réussiront pas vraiment, mais d’autres visent à organiser des provocations et à vous y impliquer », a-t-elle affirmé, sans donner plus de détails. « Alors restez vigilants, ce qui ne signifie pas qu’il faut avoir peur », a-t-elle conseillé.
Le projet de loi prévoit une troisième lecture au Parlement, et on s’attend à ce que Zourabichvili, la présidente, y oppose son veto. Néanmoins, le parti au pouvoir, Rêve géorgien, semble avoir suffisamment de soutien pour le faire avancer. Des milliers de personnes, notamment des jeunes, se sont rassemblées ce samedi dans le centre de Tbilissi, la capitale de la Géorgie, pour exprimer leur opposition à ce qu’ils appellent la « loi russe », en lien avec sa similitude à une loi russe utilisée pour supprimer l’opposition.
On voit ce projet de loi, une initiative de Rêve géorgien guidé par le très riche entrepreneur Bidzina Ivanichvili, comme un obstacle à l’adhésion de la Géorgie à l’Union européenne – une position soutenue par l’UE. Si adoptée, elle contraindra toute organisation non gouvernementale ou médiatique obtenant plus de 20% de son financement de sources étrangères à se déclarer comme « servant les intérêts d’un pays étranger ».
Le gouvernement affirme que c’est un moyen d’augmenter la « transparence » autour du financement des organisations. Cependant, beaucoup d’organisations non gouvernementales du pays ont condamné le projet de loi. Ivanichvili, 68 ans, soutient fermement le projet de loi, en opposition à ce qu’il considère être une « fausse élite soutenue par un état étranger ».
Les tensions ont augmenté samedi dernier lors d’une réunion conflictuelle mais pacifique entre les partisans et les opposants du projet de loi. Alors que l’opposition a resserré ses rangs contre le projet, le parti au pouvoir semble ne pas être prêt à faire marche arrière, déclenchant une autre crise politique dans ce petit pays du Caucase habitué aux tourments.
Des ambassadeurs d’organisations non gouvernementales ont rapporté avoir subi des menaces et de l’intimidation récemment, et ont été stigmatisés comme « agents de l’étranger » par les ardents supporters de la loi. Historiquement, lors des manifestions qui ont eu lieu en avril, les forces de l’ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc pour disperser les manifestants.
La loi sur « l’influence étrangère » a été introduite pour la première fois par le Rêve Géorgien en 2023. Cependant, des protestations à grande échelle avaient obligé le gouvernement à la retirer. Sa réintroduction soudaine au début d’avril a provoqué un émoi et déclenché l’indignation d’un grand nombre de Géorgiens, en particulier les plus jeunes.
Ces perturbations surviennent en amont des élections législatives prévues en octobre, jugées comme un examen crucial pour la démocratie dans cet ancien État soviétique. En décembre 2023, l’Union européenne a octroyé à la Géorgie le statut de candidat officiel, signalant que Tbilissi devrait entreprendre des réformes de ses systèmes judiciaire et électoral, ainsi que renforcer la liberté de la presse et contrôler l’influence des oligarques avant le début officiel des négociations d’adhésion.
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