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« Étudiants favorisés dans établissements bien financés »

L’Université de la Sorbonne dispose d’un budget de 14 500 euros par élève, tandis que l’Université Rennes-II n’en a que 5 400 euros. À l’université de Toulouse Jean-Jaurès, plus de 77% du personnel détient un poste permanent, comparativement à seulement 55% à Strasbourg. Pour ce qui est de l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, le ratio est de 5,4 professeurs pour chaque 100 étudiants, alors qu’à Nîmes, ce chiffre tombe à 2,1.

Ces statistiques, fournies par le dernier bilan de la Conférence des professionnels de l’éducation supérieure et de la recherche, mettent en évidence les disparités significatives entre les institutions d’enseignement supérieur en France. Toutefois, cette situation n’a pas toujours été la norme, comme l’explique Emmanuelle Picard, enseignante à l’École normale supérieure de Lyon, spécialiste en histoire de l’enseignement supérieur, et présidente du Réseau d’études sur l’enseignement supérieur.

Quand ont commencé à apparaître ces inégalités entre les universités françaises ?

Historiquement, le système universitaire français s’est fondé sur une égalité marquée entre les institutions. Les réformes de Napoléon au début du XIXe siècle, qui ont jeté les bases du système actuel, prônaient l’idéal d’un service public centralisé qui couvrait l’ensemble du territoire. Ce modèle se basait sur des diplômes nationaux, des conditions d’apprentissage uniformes dans l’ensemble du pays, un corps enseignant financé par l’État et fonctionnant dans le même conditions quel que soit l’emplacement de l’institution, et d’autres facteurs similaires.

En France, le financement des facultés et des chercheurs est principalement déterminé par le nombre d’étudiants inscrits, sans égard au domaine d’étude. Cette approche diffère grandement de celle observée dans le système éducatif britannique, où la décentralisation et une certaine hiérarchie entre les écoles sont la norme. Cependant, en France, mis à part quelques distinctions entre les institutions parisiennes et provinciales, cette approche uniforme a persisté jusqu’aux années 1960.

Alors, comment cette homogénéité a commencé à se désintégrer ? Lors de la première grande vague d’inscription dans les années 1960, coïncidant avec l’arrivée des enfants du baby-boom dans les universités, le gouvernement a commencé à modifier ce principe d’égalité. Face à une demande accrue de techniciens et de scientifiques, l’Etat a augmenté son financement, tant en termes de structures que de personnel, pour les facultés axées sur les sciences exactes et expérimentales (comme les mathématiques, la physique et la biologie). Ainsi, la valeur attribuée aux étudiants de ces disciplines a été implicitement considérée comme supérieure à celle des étudiants en sciences humaines et sociales, en témoigne l’attribution de ressources spécifiques et d’espaces plus grands.

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