La question de la discrimination basée sur l’aspect physique, ou profilage racial, gagne en prépondérance au Japon, en raison de l’augmentation constante du nombre d’immigrants. En décembre 2023, ils étaient 3.4 millions, soit une hausse de plus de 10% par rapport à l’année précédente. Dans un témoignage anonyme publié en avril dans le journal de centre-gauche Mainichi, un officier de police avoue avoir commencé à percevoir que son ordre de « mener une répression contre les étrangers » – autrement dit, de les juger uniquement sur leur apparence – constituait une violation des droits humains.
Après avoir servi une dizaine d’années dans les forces de l’ordre, ce policier explique que dans son poste local, il avait pour mission spécifique d’interroger les étrangers et de vérifier leurs cartes de résidence. Inquiétant, il y avait même un « mois de répression des étrangers » au cours duquel les contrôles étaient intensifiés, avec des fouilles pour du matériel illicite comme des drogues ou des armes. Avec ces ordres provenant de la division des enquêtes criminelles, le but était de traquer les personnes en situation irrégulière. Il souligne que ces contrôles ne visaient pas des ethnies spécifiques, mais il admet qu’il existait des préjugés contre « les personnes Noires, les Asiatiques du Sud-Est » ou encore les Coréens – qui sont la deuxième plus grande communauté d’immigrants au Japon et ont longtemps été victimes de discrimination.
En 2020, le profilage racial a été dénoncé par le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale qui a conseillé de prendre des mesures pour le prévenir. Cette problématique a été mise en lumière publiquement en décembre 2021 lorsque l’ambassade américaine au Japon a exprimé ses inquiétudes via Twitter, en déclarant avoir eu « un nombre croissant de rapports sur des étrangers ayant été arrêtés et fouillés par la police sans raison autre que le profilage racial ».
En réponse à ce message, les législateurs japonais ont appelé l’Agence Nationale de Police à initier une investigation interne. En novembre 2022, celle-ci a admis six incidents de contrôle injustifié ou sans motif, fondés sur des préjugés raciaux. À ce moment-là, lorsque le Japon avait fermé toutes ses frontières à cause de la pandémie de Covid-19, le contrôle des étrangers avait été renforcé par la police dans le but de repérer ceux qui séjournaient illégalement. Surtout, elle visait les quartiers riches en populations étrangères, comme Okubo, à Tokyo.
Une mauvaise image
Une étude conduite par le barreau de Tokyo entre janvier et février 2022 auprès des résidents non-japonais a également démontré que 62,9% des 2094 individus interrogés ont été interrogés par la police dans les cinq ans précédents. De ce chiffre, 85,4% d’entre eux ont été approchés parce qu’ils étaient étrangers.
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