En prélude aux élections européennes prévues entre le 6 et le 9 juin, une action historique a été initiée par les vingt-sept académies de sciences de l’Union européenne (UE). Elles ont choisi d’interpeller l’ensemble des postulants au Parlement européen. Cet acte exceptionnel reflète le désemparement des scientifiques en Europe face à l’émergence des mouvements populistes, la négation du réchauffement climatique, l’idéologie antivaccination et le déferlement de désinformation. Plus particulièrement, les débats sur une politique d’immigration plus sévère qui pourrait compromettre la mobilité des chercheurs ou des étudiants sont en cause.
Le lundi 6 mai, au Palais des académies à Bruxelles, différents acteurs majeurs se sont réunis : le Belge Didier Viviers, l’Italien Patrizio Bianchi, membre de l’Accademia nazionale dei lincei, la Hollandaise Marileen Dogterom, présidente de l’Académie néerlandaise des sciences, et le Français Alain Fischer, président de l’Académie des sciences. Ils ont dévoilé une tribune qu’ils ont élaborée ensemble, dont le titre est « L’avenir de l’Europe dépend d’une science et d’un enseignement solides, ouverts et libres ».
Patrizio Bianchi déclare : « Il y a cinq siècles, Galilée créait l’Accademia dei lincei, dont je suis maintenant membre. À cette époque, la protection des scientifiques était nécessaire… Aujourd’hui, nos vingt-sept institutions tentent de rappeler aux dirigeants européens l’importance de ce secteur pour l’avenir du continent. Les élections de juin ne seront pas comme d’habitude, elles seront déterminantes dans un climat d’incertitudes particulièrement élevées. »
Tomasz Poprawka de l’Académie polonaise des sciences à Bruxelles confirme que « nous sommes à un moment crucial », soulignant que « la recherche est désormais l’un des principaux piliers politiques de l’Union Européenne ». Alain Fisher concède que « nous n’avons pas innové avec ce texte, mais nous mettons l’accent sur les principes et les valeurs qui nous sont chers ». Il souligne que c’est la première fois qu’ils ressentent le besoin de prendre position de la sorte avant les élections européennes – spécifiquement face aux menaces que l’extrême droite pourrait représenter pour la liberté de mouvement des chercheurs et des étudiants.
« Protéger les fondements de la liberté universitaire » fait partie de leur appel. Les scientifiques insistent notamment sur « la nécessité de maintenir l’ouverture et la collaboration internationale dans le domaine scientifique ». Selon eux, « une coopération scientifique internationale ouverte est cruciale pour les relations internationales au-delà du monde académique. Les décideurs politiques devraient donc éviter de mettre en place des obstacles décourageants dans ce sens ». Ils doivent veiller à préserver les principes de liberté académique, d’autonomie des universités et d’échange libre de personnes et d’informations, tout en assurant des conditions de travail sécurisées et durables pour les chercheurs et les étudiants. Cette position est d’autant plus pertinente aujourd’hui, alors que de nombreux partis politiques de droite et d’extrême droite préconisent une Europe plus fermée.
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