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3 mai 2024 9 h 09 min

« Requiem pour Hong Kong: Désamour Lent »

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Dorian Malovic, journaliste chez La Croix, est un voyageur assidu de l’Asie et particulièrement de la Chine depuis près de quatre décennies. Malgré son amour profond pour cette région, il est aujourd’hui profondément déçu et se sent trahi. Il avait autrefois envisagé avec espoir l’ouverture et la démocratisation de la Chine, mais il assiste à une réalité contraire. Son dernier livre, « Requiem pour Hong Kong » (Bayard, « Bayard Récits », 272 pages, 19 euros), ne se concentre pas tant sur le déclin de cette région administrative spéciale mais plutôt sur ce désamour croissant.

Basant son ouvrage sur un grand nombre de notes qu’il a prises lors de ses reportages, Malovic nous refait vivre l’atmosphère de Hong Kong avant et après sa rétrocession en 1997, ainsi que dans la Chine post-Tiananmen, le Tibet en 2013 et le Xinjiang, où il s’est rendu en 2015. Ces lieux ne sont pas choisis par hasard. « En cinquante ans, la Chine a tué le Tibet, en vingt ans, elle a massacré le Xinjiang et en à peine une année, elle a écrasé Hong Kong en 2019 », écrit-il.

Le livre est riche en souvenirs précieux et instructifs tels que la rencontre avec les Ouïgours dans l’est de la Chine dans les années 1990. Ces derniers, malgré leur statut minoritaire et la peur qu’ils provoquaient chez les Chinois en raison de leurs dagues à lame courbe, étaient responsables des banques de rue – une situation inconcevable aujourd’hui. Il conclut simplement que « l’argent a corrompu les cœurs ».

Est-ce que la Chine a vraiment « trahi » l’Occident ou est-ce plutôt que l’Occident a préféré se faire illusion, refusant d’accepter la vérité ? Cela m’amène à un fait notable : le jour exact où Hong Kong a été rétrocédé à la Chine, pendant la nuit du 1er au 2 juillet 1997, le nouveau Conseil législatif nommé par Pékin a adopté une série de treize lois restreignant les libertés, nous rappelle M. Malovic. Ces décisions, qui sont passées inaperçues à l’époque, prennent tout leur sens avec le temps.

Un autre aspect intéressant du livre est qu’il admet que la réalité dans ce géant pays est toujours plus complexe qu’on ne le pense. En 1991, tandis que les médias internationaux ne se focalisaient que sur la répression et la surveillance en Chine, Dorian Malovic – qui ne peut être accusé d’indulgence envers le régime communiste – a été particulièrement frappé, lors d’un voyage dans le sud du pays, par l’élan économique : il a constaté que le commerce, qu’il soit « légal ou illégal », prédominait. Cette dynamique s’est étendue à tous les secteurs de la société et a perduré environ trente ans. Sur la base de son expérience dans les quartiers sordides de Dalian (province de Liaoning) en 2012, il conclut ainsi : « Le communisme est désormais mort, mais l’argent a perverti les cœurs. »

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