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« Vilanova: Tous influencés par télé-réalité »

Il y a environ vingt-trois ans, presque jour pour jour, à la date du 26 avril 2001, le spectacle « Loft Story » a fait son apparition sur nos écrans de télévision, inaugurant ainsi l’ère de la télé-réalité dans le paysage audiovisuel français. Au cours de près d’un quart de siècle, bien que le format ait perduré, les émissions ont évolué, les participants se sont professionnalisés, et la perception du public a également changé. Parmi ces spectateurs, la journaliste indépendante Constance Vilanova, qui a grandi en compagnie de ces programmes qui ont marqué son adolescence, offre maintenant à l’âge de 31 ans un regard introspectif personnel et professionnel dans un essai : Vivre pour les caméras (JC Lattès, 224 p., 20 €).

Comment la télé-réalité a-t-elle façonné une génération, au-delà même de ceux qui la regardent ?
Au cours d’une présentation dans un lycée, j’ai demandé aux étudiants combien d’entre eux regardaient « Les Marseillais » [une émission phare de la télé-réalité, diffusée sur W9 de 2012 à 2022]. Personne n’a levé la main, mais ils connaissaient tous Maeva Ghennam et Milla Jasmine, des participantes marquantes de l’émission, et ils avaient tous vu les scènes de conflit ou de violence extraits de ces émissions. Ainsi, ces programmes touchent tout le monde, que l’on soit spectateur ou non. Cela se manifeste également dans les modes de narration sur les réseaux sociaux, où il faut maintenant tout montrer, il y a un besoin incessant d’extimité, de montrer la « réalité », comme à la télé-réalité, y compris les moments difficiles. Notamment sur TikTok, où l’on peut voir des jeunes qui se filment en pleurant et qui narrent leur rupture amoureuse semaine après semaine.

Comment ces programmes ont-ils contribué à normaliser la violence sexiste et sexuelle ?

L’environnement global est intrinsèquement sexiste : le système encourage les participantes à former des couples pour gagner en visibilité, sinon elles sont expulsées par la production et ne reviennent pas d’un épisode à l’autre. Pour les hommes, la masculinité prônée est aussi problématique, avec des candidats qui enchaînent les liaisons et trompent impunément des femmes passives et attristées. La télé-réalité a longtemps été un point aveugle médiatique, donc nous n’avons pas prêté attention aux premières mises en garde des candidates qui se sont exprimées dans la presse trash ou auprès de blogueurs : certains candidats impliqués dans des actes de violences sexuelles ou sexistes ont été renvoyés à l’écran car ils étaient des personnages emblématiques de ces shows. Cela a rendu vulnérables beaucoup de participantes qui ont été réexposées à la même brutalité et relancées dans les bras de prédateurs.
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