Selon le rapport annuel publié le mardi 30 avril par cinq associations, y compris la Cimade, Forum Réfugiés et France terre d’asile, près de 47 000 étrangers en situation irrégulière ont été retenus en 2023, dont 95% étaient des hommes et un tiers étaient des citoyens algériens. Ces associations sont présentes dans les centres de rétention administrative (CRA). La plupart des personnes retenues l’ont été à Mayotte (plus de 28 000) tandis que 17 000 ont été retenues en métropole. Il y a eu une augmentation significative du nombre de personnes retenues par rapport à 2022 (43 500) et la durée de la rétention, qui a atteint près de 28 jours et demi – presque une semaine de plus que l’année précédente, notent les associations dans leur rapport. Cependant, les expulsions n’ont pas augmenté en conséquence. En métropole, seulement 36% des personnes détenues dans les CRA ont été expulsées. « En 2023, environ 1 000 personnes de plus ont été incarcérées en France, mais l’administration a effectué environ 1 000 expulsions de moins depuis les CRA », disent les associations dans leurs rapports.
Bien que l’inquiétude soit croissante à propos des déplacements vers des nations considérées comme dangereuses, telles qu’Haïti, les autorités locales n’ont pas cessé d’incarcérer la population haïtienne, surtout dans les centres de rétention de Guadeloupe et de Guyane, précisent les rédacteurs du rapport. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) avait déjà lancé une alerte en novembre 2022 sur la crise humanitaire et sécuritaire dans le pays, incitant les États à cesser les expulsions forcées d’Haïtiens. Le HCR a mis en exergue que forcer des individus à retourner dans un lieu où ils risquent d’être persécutés, torturés ou subir des préjudices graves ou irréparables serait équivalent à un « refoulement », une pratique formellement interdite par le droit international des réfugiés et des droits humains. Il a également mentionné des facteurs aggravants comme les violences sexuelles, les kidnappings, les pillages et les barrages routiers érigés par des groupes armés, en plus de « l’insécurité alimentaire aiguë ».
Malgré cette situation, quarante-sept ressortissants haïtiens ont été renvoyés en 2023 à partir des centres de rétention, principalement celui de Guadeloupe. Les groupes de défense des droits déplorent le « désintérêt pour les dangers auxquels les personnes sont confrontées » de la part des autorités judiciaires. Un Haïtien a en effet été expulsé vers Port-au-Prince le 4 décembre, malgré l’injonction de la Cour européenne des droits de l’homme demandant à la France de ne pas procéder à son expulsion. « L’expulsion a eu lieu pendant que la demande d’asile du demandeur est toujours en cours d’examen », précise Paul Chiron, responsable des actions juridiques en rétention pour la Cimade.
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