Poursuivez votre lecture de tous nos articles, exégèses et chroniques sur le conflit en Ukraine. Retrouvez les chroniques, les études approfondies et les explications de « Le Monde ». Un jeune soldat russe connu sous le nom de « Pacha », qui a fait la couverture à de « M », est décédé. Les États-Unis intègrent des missiles ATACMS à longue portée dans leurs envois d’armes à l’Ukraine. Les aviateurs ukrainiens de F-16 formés par des Européens ne seront pas prêts avant la fin de 2024.
Oksana Leuta, confrontée à la guerre sur scène et en Ukraine. Les bombes volantes, sont-elles « l’arme suprême » des forces russes ou indiquent-elles le sous-équipement des Ukrainiens ? À Odessa, quatre apprenties de l’Académie maritime affrontent la tempête de la guerre en Ukraine. En Russie, le recrutement des détenus pour se joindre à l’armée et combattre se normalise. La lutte prolongée des femmes ukrainiennes victimes de violences sexuelles, des « survivantes » dans un pays où le viol est un tabou. Quel est l’impact environnemental des conflits ?
Voici nos réponses à vos interrogations les plus courantes. Comment Moscou et Kiev exploitent-ils des drones ? La guerre des drones entre la Russie et l’Ukraine a atteint un niveau sans précédent ces derniers mois. D’après un rapport sorti en mai 2023 par un think tank britannique spécialisé en défense, les Ukrainiens perdent près de 10 000 drones par mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 par jour. Pour comparaison, l’armée française ne dispose que de plus de 3 000 avions télécommandés dans ses stocks.
Les UAV (véhicules aériens sans pilote), principalement civils, bon marché et largement disponibles, sont couramment utilisés par les Ukrainiens et les Russes. Ils sont utilisés pour surveiller le champ de bataille, guider les troupes ou les tirs d’artillerie et parfois sont modifiés pour transporter de petites charges explosives pour larguer sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Les drones kamikazes, moins nombreux mais tout aussi importants, sont équipés d’une charge explosive et sont lancés au-dessus de la ligne de front sans objectif prédéterminé. Les drones utilisés par Moscou comprennent le Lancet-3 russe et le Shahed-136 fabriqué en Iran. En l’absence d’une flotte de guerre significative, l’Ukraine utilise des véhicules maritimes télécommandés, y compris des petits kayaks remplis d’explosifs (450 kilos de TNT).
L’importance des drones dans leurs opérations a conduit les Ukrainiens et les Russes à mettre en place des moyens pour approvisionner leurs troupes à long terme, non seulement en achetant des drones civils en quantité, mais aussi en développant leur propre capacité de production. L’industrie nationale ukrainienne, qui était encore à ses balbutiements lors du déclenchement de la guerre du Donbass il y a dix ans, s’est considérablement développée depuis. Le ministre de la transformation numérique ukrainien a révélé fin août qu’une copie du drone russe Lancet avait été développée et serait bientôt lancée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.
En dépit des sanctions occidentales qui entravent son approvisionnement en composants électroniques, la Russie a semble-t-il initié la construction d’une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga. Le but serait de produire des drones-kamikazes iraniens similaires aux Shahed-136, selon les agences de renseignement américaines.
Quant aux stocks de missiles russes, leur état actuel est difficile, sinon impossible, à déterminer. Les agences de renseignement ukrainiennes font régulièrement des déclarations à ce sujet, mais leur crédibilité fait débat.
Le porte-parole de la direction générale du renseignement du ministère de la défense (GUR), Andri Ioussouv, a dit à Liga.net qu’avant la guerre, l’armée russe possédait environ 2 300 missiles balistiques ou de croisière, et elle en aurait plus de 900 au début de l’année. S’ajoutent à ce nombre des milliers de missiles antiaériens S-300 d’une portée d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’un grand stock de missiles S-400, une version plus récente trois fois plus longue portée. Vadym Skibitsky, le deuxième responsable du GUR, a indiqué en août un chiffre de 585 missiles ayant une portée supérieure à 500 kilomètres.
En termes de capacités de production, elles pourraient avoir augmenté jusqu’à une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, d’après plusieurs expertises. En octobre, le GUR évaluait cette production à 115 unités.
Selon des informations provenant de différentes sources iraniennes et citées par Reuters, la Russie a acquis et continue d’acquérir des missiles à courte portée du Iran et de la Corée du Nord. Depuis janvier, 400 missiles iraniens de la gamme Fateh-110, d’une portée de 300 à 700 kilomètres, ont été livrés à la Russie suite à un accord. Le nombre de missiles nord-coréens acquis par la Russie reste incertain, mais on sait que 24 ont été lancés en Ukraine du 30 décembre 2023 au 7 février 2024, d’après le procureur général Andriy Kostin. Les experts pensent que ces missiles sont probablement des KN-23 et KN-24, avec une portée d’environ 400 kilomètres.
Concernant les avions de combat F-16, les États-Unis ont accepté en août 2023 de transférer ces avions à l’Ukraine à la demande du président ukrainien. Plus de 300 F-16 sont présents dans neuf pays européens, dont la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, mais tous les pays qui possèdent ces avions ne peuvent pas les céder immédiatement.
Volodymyr Zelensky a mentionné l’offre de 42 F-16 promis à Kiev par les alliés occidentaux, mais cette information n’a pas été confirmée. Le Danemark a offert 19 avions, dont les six premiers devant être livrés avant la fin de 2023, suivis de huit autres en 2024 et cinq en 2025, selon la première ministre danoise, Mette Frederiksen. Les Pays-Bas ont également promis des F-16 et possèdent 42 unités, mais n’ont pas précisé combien ils prévoyaient de céder.
En outre, une formation spécifique est nécessaire pour les pilotes ukrainiens afin de manœuvrer les avions de chasse américains. Onze partenaires ukrainiens s’engagent à prendre en charge la formation des pilotes. Selon l’OTAN, les troupes ukrainiennes devraient être aptes à piloter ces avions en conditions de combat à partir du début de 2024, tandis que d’autres experts prédisent que cela se produira pendant l’été de la même année.
Quel type d’assistance militaire Kiev reçoit-elle de ses alliés?
Deux ans après le début du conflit à grande échelle, le soutien occidental pour Kiev semble perdre de son élan. Les engagements d’aide récemment pris de août 2023 à janvier 2024 ont diminué par rapport à la même période de l’année précédente, d’après le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en février 2024. Il est possible que cette tendance continue, compte tenu des difficultés du Sénat américain à approuver les aides, et des obstacles rencontrés par l’UE pour adopter une aide de 50 milliards le 1er février 2024, principalement en raison de la résistance de la Hongrie. Il est à noter que ces deux paquets d’aide n’ont pas encore été pris en compte dans le dernier rapport de l’Institut Kiel qui ne couvre que jusqu’en janvier 2024.
Les statistiques de l’institut allemand révèlent une diminution et une concentration du nombre de donateurs autour d’un groupe de pays centraux, notamment les États-Unis, l’Allemagne et les pays du Nord et de l’Est de l’Europe. Ces derniers s’engagent à fournir une aide financière importante et des armes de pointe. Au total, depuis février 2022, les pays supportant Kiev se sont engagés à fournir minimum 276 milliards d’euros dans le domaine militaire, financier ou humanitaire.
Dans des termes absolus, les nations les plus prospères ont démontré le plus de générosité. Les États-Unis sont les donateurs les plus importants de loin, ayant promis plus de 75 milliards d’euros, dont 46,3 milliards sont destinés à l’assistance militaire. Les pays de l’Union européenne ont promis des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides mutuelles provenant des fonds de l’Union européenne (93,25 milliards d’euros), soit un total de 158,1 milliards d’euros.
Cependant, lorsqu’on compare ces contributions au produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, la hiérarchie change. Les États-Unis tombent à la vingtième position (0,32 % de leur PIB), bien après les pays proches de l’Ukraine ou les anciennes républiques soviétiques amies. L’Estonie est en tête du classement d’aide en proportion au PIB avec 3,55 %, suivie par le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %). La Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %) complètent le top 5. Les trois États baltes, qui partagent tous des frontières avec la Russie ou son alliée la Biélorussie, sont parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.
En ce qui concerne le pourcentage du PIB, la France se situe à la vingt-septième place, ayant engagé 0,07 % de son PIB, juste derrière la Grèce (0,09 %). L’aide apportée par Paris a constamment diminué depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – la France était vingt-quatrième en avril 2023, et treizième à l’été 2022.
Qu’en est-il des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne ?
Dans le contexte des tensions existantes depuis plusieurs mois entre la Pologne et l’Ukraine, le transit des grains ukrainiens est devenu une pomme de discorde majeure. Au printemps 2022, la Commission européenne avait initié des « passages solidaires » pour aider à l’évacuation et à la distribution des produits agricoles ukrainiens sans taxes douanières vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Cependant, à partir du début des conflits, environ la moitié des céréales d’Ukraine passent ou terminent leur voyage dans l’Union européenne (UE), selon la Fondation Farm, un think tank qui se concentre sur les questions agricoles mondiales. Ces grains présentent un coût significativement inférieur à celui du blé produit dans l’UE, plus particulièrement dans les pays d’Europe centrale.
En soulignant que ces grains déstabilisent leur marché local et, par conséquence, les revenus de leurs agriculteurs, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont décidé d’un commun accord de stopper leurs importations en avril 2023. Bruxelles avait permis cet embargo à condition qu’il n’interfère pas avec le transit vers d’autres pays et qu’il ne s’étende que sur une durée de quatre mois. Cependant, alors que la Pologne estime que la question de fond n’a toujours pas été résolue, elle a choisi de garder sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été. Par contre, Bruxelles croit que l’embargo n’est plus justifié, car leurs analyses indiquent que la distorsion des marchés nationaux pour les céréales avait cessé.
Des agriculteurs en Pologne barricadent la frontière avec l’Ukraine pour stopper l’intrusion des camions ukrainiens sur le sol national. Ils exigent un « embargo total » sur les produits alimentaires et agricoles ukrainiens. Ces agriculteurs manifestent à cause de l’augmentation drastique de leurs coûts de production, l’encombrement des silos et entrepôts, et la chute des prix. Le président ukrainien, voyant le blocus frontalier polonais comme un signe de la « détérioration de la solidarité » pour son pays, avait demandé des négociations avec la Pologne en début 2024. Il déclara également que « Seul Moscou tire profit » de ces conflits, condamnant « l’apparition des slogans pro-Poutine ouverts ».
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