En se basant sur le livre « Les Grandes Déconvenues. La Renaissance, Sumatra, les frères Parmentier » de Romain Bertrand (Seuil, collection ‘L’univers historique’, de 384 pages, à 24,50 € et disponible en format numérique à 18 €), une exploration détaillée de l’histoire des frères Parmentier est réalisée. Durant le 16ème siècle, les explorateurs portugais et espagnols étaient déjà en pleine expansion du monde, laissant les Français en retard dans cette course d’exploration économique et militaire. Parmi les entreprises françaises tardives figure celle des frères Parmentier, une aventure qui les a menés à l’île actuellement connue sous le nom de Sumatra en Indonésie. Cependant, leur voyage fut un échec cuisant, sans aucun bénéfice et qui s’est terminé tragiquement avec le décès des deux capitaines et de la majorité de leur équipage.
Bertrand analyse ce chapitre peu connu de l’histoire pour explorer la Renaissance sociale et ses légendes. Par exemple, les frères Jean et Raoul Parmentier, malgré leur échec, ont été célébrés dans le 19ème siècle comme incarnations de l’humanisme à la française, dans un temps où la nation cherchait des héros. En réalité, cependant, malgré les noms poétiques de leurs vaisseaux – La Pensée et Le Sacre – rien ne prouve qu’ils étaient des pionniers de la modernité. En effet, ils étaient impliqués dans le commerce illégal de biens précieux et toutes leurs connaissances géographiques et nautiques étaient principalement attribuables aux marins portugais, qui les avaient précédés de plusieurs décennies.
Qu’ont-ils trouvé, ces soi-disant grands explorateurs français? Le travail de Romain Bertrand est de suivre leurs aventures en se basant sur un journal de bord et des attestations écrites de leurs camarades, qu’il examine d’une manière critique approfondie. Avec chaque nouvelle étape de leur expédition, ils rencontraient de moins en moins de la barbarie qu’ils prévoyaient. Contre toute attente – et à leur grand déplaisir –, les Noirs des tropiques étaient non seulement vêtus, mais aussi multilingues, habiles navigateurs et membres de civilisations urbaines sophistiquées, où l’Islam se manifestait en plusieurs adaptations locales variées.
La pseudovocation civilisatrice de l’Europe
Le récit, qui se situe au cœur des motivations des gens de cette époque, fait vaciller nos perceptions. Romain Bertrand joue avec des références culturelles modernes, bien loin du domaine académique. En l’absence de tout document écrit par les habitants de Sumatra, il se sert du point de vue des Fremen, le peuple colonisé du roman de science-fiction Dune, de Frank Herbert (1965 ; éd. Robert Laffont, 1970), pour se représenter leur perspective. Par cette mesure, les dévastations perpétrées par les Européens sont aussi blâmables que celles commises par l’Empire sur la planète Arrakis.
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