×
google news

« L’Europe souffre d’une union incomplète »

La Commission européenne a fait appel à ses poids lourds romains avec l’espoir de guider l’Europe vers de nouvelles directions. Le 18 avril, l’ancien Premier ministre italien Enrico Letta a dévoilé son rapport sur la réforme du marché unique européen lors du sommet européen. Ce document vise à éviter que l’Europe ne se distance trop des États-Unis et de la Chine. Par ailleurs, Mario Draghi, lui aussi ex-Premier ministre italien et ancien président de la Banque Centrale Européenne (BCE), est chargé de produire un rapport sur la compétitivité de l’Union européenne (UE), dont il a présenté les grandes lignes le 16 avril lors d’une conférence sur le pilier européen des droits sociaux.

Le constat chez les deux hommes est le même : ils estiment que la présence de trop nombreuses frontières internes limite la portée du marché unique. C’est donc une nécessité absolue pour eux de promouvoir l’union des marchés de capitaux. Sans cela, ils craignent que l’épargne abondante de l’Europe continue de s’évader à l’étranger, en particulier vers les États-Unis, au lieu de soutenir les besoins d’investissement de l’Europe. Cependant, est-ce suffisant pour faire face au monde post-covid et éloigner la crainte croissante que « notre Europe est mortelle », comme l’a exprimé Emmanuel Macron à la Sorbonne le 25 avril ?

Il est incertain si cette fragmentation, reconnue comme étant à l’origine de la défaillance européenne, est en fait un symptôme d’un défaut structurel profond. L’Europe souffre d’une union inachevée parmi ses États membres qui ont accepté de partager l’euro et la BCE, mais pas leur budget ni leur fiscalité (d’après « Un pacte budgétaire et fiscal européen face aux crises » écrit par Thomas Piketty et Antoine Vauchez, publié dans L’Economie politique no 101, 2024). En conséquence, les dépenses communes entre les États membres sont maigres.

L’absence d’économies d’échelle

Mario Draghi exprime son désarroi concernant le marché de la commande publique, qui reste fragmenté, ce qui affecte particulièrement les dépenses de défense et de sécurité, largement dispersées alors que l’Europe doit rebâtir sa souveraineté dans ce domaine. Cependant, il ne donne pas la raison principale: précisément à cause de l’absence d’un budget commun significatif et de taxes partagées, il y a peu de revenus partagés parmi les États membres, donc insuffisamment de dépenses communes. La perte d’économies d’échelle, qu’il dénonce en regrettant que l’Europe n’exploite pas naturellement sa taille à l’instar des grandes économies continentales concurrentes (États-Unis, Chine), est aussi le fruit de cette union inachevée.

Il reste encore 57.47% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Lire aussi

example 44
Actualité

Grégory Delaplace : morts débordent cadres funéraires

1 novembre 2024
Dans son ouvrage récent titré "La Voix des fantômes. Quand débordent les morts" (Seuil, 2024), l'anthropologue Grégory Delaplace s'interroge sur la nature des entités que deviennent les défunts dans l'interaction…
example 42
Actualité

Présidentielle 2024 : sondages et questions

1 novembre 2024
"Le Monde offre une couverture en direct de la compétition présidentielle américaine, où les sondages indiquent une lutte acharnée entre Donald Trump et Kamala Harris. - L'actualité la plus récente.…
example 39
Actualité

COP16 biodiversité : fin prometteuse

1 novembre 2024
Contradictant les prévisions sur une extension des pourparlers à Cali, en Colombie, samedi, Susana Muhamad, présidente de la 16e conférence de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique…