Le sujet de la délinquance juvénile, supposément croissante et de plus en plus violente, refait surface sur la scène politique et médiatique. Le Premier ministre, les ministres, les préfets et les syndicats de police tous s’alignent sur cette affirmation, indiquant une menace éventuelle à la paix et à l’unité sociale.
Il est indéniable que les incidents récents à Grande-Synthe (Nord), Romans-sur-Isère (Drôme) ou Viry-Châtillon (Essonne) et l’attaque à Montpellier durant les deux premières semaines d’avril ont bouleversé le public. Faut-il pour autant en déduire une tendance massive, exacerbée par les médias sociaux et une dégradation de l’autorité et du sens du devoir chez les plus jeunes? Même si l’émotion provoquée par ces événements est compréhensible, les données disponibles ne corroborent pas cette perception.
Les chiffres des tribunaux révèlent une diminution significative de la délinquance chez les mineurs. Ceux qui ont été dirigés vers les alternatives aux procédures judiciaires, pour les infractions moins sérieuses, ont baissé de 40% entre 2018 et 2022. Quant aux infractions plus graves, qui ont conduit à des jugements devant les juges pour enfants ou les juges d’instruction, elles ont diminué de 33% pendant la même période. En somme, le nombre de mineurs condamnés n’a fait que décroître depuis 2017. De plus, ils ne forment qu’une infime minorité parmi les auteurs présumés de meurtres ou de tentatives de meurtre.
Renforcement de la législation.
Certaines personnes peuvent avancer l’argument d’une certaine indulgence de la justice, cependant, concernant les adultes, nous avons observé une amplification des sentences et des emprisonnements de 2018 à 2022. En examinant les centres de détention, ceux réservés pour les jeunes – les centres pour jeunes délinquants et les zones de prison pour mineurs -, affichent un taux d’occupation « seulement » de 60% à la fin de l’année 2023, tandis que ce taux grimpe à plus de 145% dans les maisons d’arrêt pour adultes. De plus, un grand nombre de ces adolescents en prison (56%) sont en détention préventive, en attente de leur jugement.
L’abaissement du nombre de jeunes sanctionnés par le système judiciaire est encore plus frappant quand on considère que durant cette période, les lois destinées aux comportements jugés irrespectueux ou inciviques des jeunes se sont endurcies, surtout dans l’espace public.
Certes, ces statistiques n’apaiseront pas la tristesse des familles touchées par ces actes. Elles servent simplement à questionner ceux qui utilisent ces tragédies pour faire des suppositions sur l’évolution de notre société et pour promouvoir une politique de sanctions accrues. Ces individus ignorent, ou prétendent ne pas savoir, que les lois punitives contre les mineurs se sont considérablement accrues depuis le milieu des années 90 et ce, jusqu’à une période très récente.
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