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25 avril 2024 12 h 13 min

« Guerre Ukraine: Russie intensifie minage frontière »

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Depuis longtemps, le conflit des drones entre la Russie et l’Ukraine s’est intensifié. Conformément à une étude publiée en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé en défense, les Ukrainiens perdent environ 10 000 drones chaque mois dans la bataille, ou plus de 300 par jour. Pour comparer, l’armée française compte un peu au-delà de 3 000 aéronefs télécommandés dans ses dépôts.

Les Ukrainiens et Russes se servent principalement de petits drones civils économiques et disponibles en masse. Ces drones sont utilisés pour surveiller le champ de bataille et guider les troupes ou les tirs d’artillerie; certains sont modifiés pour transporter de petites charges explosives, qui sont par la suite lâchées sur des tranchées ou des véhicules blindés.

Il existe également moins de drones kamikazes qui jouent un rôle crucial. Ces drones, équipés d’une charge explosive, sont envoyés au-dessus de la ligne de front sans mission prédéfinie. Moscou fait usage des drones russes Lancet-3, ainsi que des Shahed-136 fabriqués en Iran. Sans une flotte de guerre adéquate, l’Ukraine défie l’ennemi avec des véhicules maritimes sans pilote, de petits kayaks guidés à distance et remplis d’explosifs (450 kilos de TNT).

L’importance des drones dans leurs opérations a conduit Ukrainiens et Russes à mettre en place des stratégies pour soutenir leurs troupes sur le long terme. Ils le font non seulement en achetant en grand nombre des drones civils sur le marché, mais aussi en établissant des capacités de production internes. Au début de la guerre du Donbass qui a commencé il y a une dizaine d’années, l’industrie nationale ukrainienne était encore balbutiante, mais elle a depuis pris de l’ampleur. A la fin d’août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé que l’Ukraine avait réussi à copier le drone russe Lancet et que le modèle, baptisé Peroun, dieu slave de la foudre et du tonnerre, serait prochainement lancé.

Les sanctions occidentales ont limité l’accès de la Russie à des composants électroniques, rendant l’approvisionnement difficile. Néanmoins, les agences de renseignement américaines rapportent que la Russie a commencé la construction d’une usine dans la zone d’Alabouga, une zone économique spéciale. Cette usine est destinée à produire des drones-kamikazes, basés sur des conceptions iraniennes, tels que les Shahed-136.

Le stock de missiles russes demeure un mystère. Les chiffres exacts sont difficilement accessibles, voire inaccessibles. Les rapports fournis par les services de renseignements ukrainiens sont réguliers mais leur fiabilité est discutable.

Andri Ioussov, représentant de la direction générale du renseignement du ministère de la défense (GUR), cité par Liga.net, indique que l’armée russe possédait environ 2 300 missiles balistiques ou de croisière avant la guerre et qu’il restait plus de 900 de ces missiles au début de l’année. En plus de cela, mentionne Ioussov, l’armée russe détient plusieurs milliers de missiles antiaériens S-300, ayant une portée de 120 kilomètres, ainsi qu’un stock conséquent de S-400, un modèle plus récent avec une portée triple. En août, le nombre deux du GUR, Vadym Skibitsky, proposait le nombre de 585 pour les missiles ayant une portée supérieure à 500 kilomètres.

Quant à la capacité de production de la Russie, elle serait passée à une production d’une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, selon les estimations de plusieurs experts. Le GUR estimait cette production à 115 exemplaires en octobre.

La Russie aurait fait l’acquisition de missiles de courte portée en provenance d’Iran et de Corée du Nord, et continuerait de faire des achats similaires. Des sources iraniennes mentionnées par l’agence Reuters indiquent qu’environ 400 missiles iraniens de la famille Fateh-110 (portée de 300 à 700 kilomètres) auraient été fournis depuis janvier, date à laquelle un accord présumé aurait été signé. Le nombre exact de missiles que la Russie a obtenu de la Corée du Nord reste inconnu, cependant, il a été rapporté que 24 ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. Des experts ont analysé les débris et les trajectoires et pensent qu’il s’agit très probablement de missiles KN-23 et KN-24 d’une portée d’environ 400 kilomètres.

En ce qui concerne les avions de combat F-16, suite à une requête formelle du président ukrainien, les États-Unis ont accepté en août 2023 de transférer ces aéronefs à l’Ukraine. Bien qu’il existe potentiellement plus de 300 F-16 répartis dans neuf pays européens – dont la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, pour n’en nommer que quelques-uns – tous les États en possession de ces avions ne sont pas prêts à en céder immédiatement.

Volodymyr Zelensky a mentionné le chiffre de 42 F-16 promis par les alliés occidentaux à Kiev, une information qui n’a cependant pas été confirmée. Le Danemark a promis d’en fournir 19. Les six premiers n’étaient pas censés être livrés avant la fin de 2023, 8 autres devraient suivre en 2024 et 5 autres en 2025, a déclaré la première ministre danoise, Mette Frederiksen. Les Pays-Bas, qui en avaient aussi promis, ont un total de 42 unités, mais n’ont pas indiqué combien ils prévoyaient de céder.

Les pilotes ukrainiens doivent recevoir une formation spécifique pour manipuler les avions de combat américains. C’est une initiative soutenue par onze pays partenaires de Kiev. L’OTAN a indiqué que ce ne serait pas avant le début de 2024 que ces forces seraient prêtes à utiliser ces avions dans des scénarios de combat, tandis que d’autres spécialistes prévoient que cela se produira durant l’été de la même année.

Concernant le soutien militaire à Kiev de la part de ses alliés, il est intéressant de constater que deux ans après l’escalade du conflit, la dynamique de l’assistance occidentale à Kiev se flétrit. Le rapport publié par l’Institut Kiel en février 2024 met en lumière un déclin de l’aide nouvellement promise entre août 2023 et janvier 2024 par rapport à la même période de l’année antérieure. Cette tendance baissière risque de perdurer, compte tenu des difficultés de l’Union européenne (UE) et du Sénat américain à obtenir l’approbation de nouvelles aides. Il convient de noter que ces deux dernières propositions d’aide n’ont pas été prises en compte dans le bilan le plus récent de l’Institut Kiel.

Les chiffres de ce même institut indiquent aussi une réduction et une concentration du nombre de donateurs. Les principaux bailleurs sont les États-Unis, l’Allemagne, et les pays d’Europe du Nord et de l’Est. Ces pays promettent non seulement un soutien financier d’envergure mais également une aide militaire de pointe. Au total, depuis février 2022, les pays en soutien à Kiev se sont engagés à contribuer à hauteur d’au moins 276 milliards d’euros dans les domaines militaire, financier et humanitaire.

Les nations les plus prospères se sont révélées être les plus magnanimes en termes de valeur absolue. Les États-Unis se distinguent comme les principaux bienfaiteurs, annonçant plus de 75 milliards d’euros d’aide, dont 46,3 milliards sont destinés à l’aide militaire. Les pays membres de l’Union Européenne ont conjointement révélé des aides bilatérales s’élevant à 64,86 milliards d’euros et des aides collectives pour un montant de 93,25 milliards d’euros, émanant des fonds de l’Union Européenne, s’additionnant à un total de 158,1 milliards d’euros.

Quand ces donations sont rapportées au produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, le classement se modifie. Les États-Unis se retrouvent au vingtième rang, contribuant 0,32 % de leur PIB, bien derrière certains pays limitrophes de l’Ukraine ou des anciennes républiques soviétiques. L’Estonie domine en terme de dons proportionnels au PIB, avec un ratio de 3,55 %, suivi du Danemark (2,41 %) et de la Norvège (1,72 %). Les deux dernières places du quintet sont occupées par la Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %). Les trois États baltes, ayant tous des frontières avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, figurent parmi les donateurs les plus généreux depuis le commencement du conflit.

En ce qui concerne le classement par pourcentage du PIB, la France se trouve à la vingt-septième place, en s’engageant à hauteur de 0,07 % de son PIB, juste après la Grèce (0,09 %). L’aide fournie par la France a connu une décroissance constante depuis le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – la France occupait la vingt-quatrième place en avril 2023, et la treizième durant l’été 2022.

Que peut-on dire des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne ?

Depuis un certain temps, il y a une tension entre l’Ukraine et la Pologne, principalement en raison du transit des céréales ukrainiennes. Au cours du printemps 2022, des « corridors de solidarité » ont été créés par la Commission européenne pour aider à l’exportation et à la commercialisation des produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient, sans imposer de taxes douanières. Cependant, environ la moitié des céréales ukrainiennes passent par l’Union européenne (UE) ou finissent leur trajet là, d’après la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les questions agricoles mondiales. Ces céréales sont vendues à des prix bien inférieurs à ceux du blé produit au sein de l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.

En raison de l’impact de ces céréales sur leurs marchés locaux et des revenus de leurs agriculteurs, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont toutes décidé de bloquer unilatéralement leurs importations en avril 2023. Bruxelles avait approuvé cet embargo à condition qu’il n’entrave pas le transit vers d’autres pays et qu’il ne dure que quatre mois. Cependant, Varsovie a choisi de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été, arguant que le problème sous-jacent n’était pas résolu, bien que Bruxelles ait jugé que l’embargo n’était plus nécessaire car leurs analyses montraient qu’il n’y avait pas de distorsion des marchés nationaux des céréales.

Les exploitants agricoles en Pologne ont mis en place un blocus à la frontière avec l’Ukraine pour empêcher l’accès des camions venant de ce pays à leur nation. Ils exigent une interdiction totale des produits alimentaires et agricoles ukrainiens. Ils se plaignent notamment de l’augmentation dramatique de leurs frais de production alors que leurs silos et entrepôts débordent et que les tarifs sont à leur niveau le plus bas. Au début de 2024, le président ukrainien considérait que le siège de la frontière polonaise était preuve de l’affaiblissement de la solidarité envers son pays et a demandé des discussions avec la Pologne. Il a également déclaré: « Seule Moscou tire profit » de ces tensions, en dénonçant « l’émergence de slogans clairement en faveur de Poutine ».

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