Envisageons la situation actuelle de la Chine. TikTok, l’une des premières entreprises chinoises à avoir réellement réussi sur les marchés étrangers, est désormais sur la cible des États-Unis. Après un premier vote positif au Sénat, une proposition législative qui pourrait obliger ByteDance, la société mère de TikTok, à renoncer à l’application ou à la voir bloquée a été massivement soutenue par les deux partis à la Chambre des représentants le samedi 20 avril. Aucun doute n’existe sur l’adoption finale de cette loi par un dernier vote du Sénat dans les jours à venir et le président Biden a déjà exprimé sa volonté de signer le texte.
Pour la Chine, cela démontre le double visage du discours américain sur une Chine qui serait chaleureusement accueillie dans son ascension vers le statut de superpuissance. Cela rappelle les obstacles rencontrés par Huawei, dont les succès dans le domaine des smartphones ont été gravement affectés par l’interdiction d’accès au système d’exploitation Android de Google. En outre, la mise en place de contrats 5G a été retardée en raison du lobbying intensif mené par Washington contre elle. De ce point de vue, chaque fois qu’une entreprise chinoise prospère, les États-Unis s’efforcent d’orchestrer sa chute. Les entreprises telles que BYD dans le domaine automobile, CATL dans les batteries, et les sites de mode ultrarapide et à prix cassés Shein et Temu pourraient être les prochaines cibles.
Dans une analyse pour la Fondation Carnegie, Xing Jiaying, qui mène des recherches à l’école Sinnathamby-Rajaratnam des études internationales à Singapour, considère la possible réponse de la Chine à la situation de TikTok. « Il est plus plausible que Beijing optera pour une décision politique d’empêcher la vente pour maîtriser les exportations, plutôt que d’accepter la cession pour minimiser les pertes commerciales de ByteDance. Cette méthode pourrait enflammer une rhétorique déjà forte contre Washington, accentuant encore les tensions diplomatiques entre la Chine et les États-Unis » énonce-t-elle. Comment la Chine, dont une de ses entreprises a conçu un algorithme très performant, pourrait-elle accepter politiquement de céder celui-ci, sous la contrainte, à la puissance qu’elle souhaite dépasser ?
Politique et éthique
Cependant, dans cette lutte, on peut affirmer sans risque que Beijing aura du mal à imposer son point de vue. La République populaire de Chine est très reconnue pour bloquer les sites étrangers, spécifiquement les réseaux sociaux américains. Il est assez ironique de l’entendre se plaindre d’actions similaires de la part de ses adversaires, comme c’est ironique de voir ses propagandistes utiliser Twitter, une plateforme à laquelle ils ne sont pas supposés avoir accès, tout comme le reste des citoyens chinois. En effet, Facebook, YouTube et Twitter sont interdits en Chine depuis 2009, Instagram l’est depuis 2014 et WhatsApp depuis 2017… cette liste ne finit pas.
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