Pierre Hermé, successeur de trois générations de boulangers-pâtissiers à Colmar, a révolutionné le monde sucré français à partir des années 1990 et a constitué un véritable empire grâce à ses célèbres gâteaux et macarons. Le 29 avril, il inaugure une nouvelle boutique dédiée au chocolat sur le boulevard des Capucines à Paris. Depuis son apprentissage, il a développé un véritable amour pour le vin, une passion qu’il partage avec nous lors d’une rencontre le 11 avril dans ses bureaux parisiens.
Natif de Colmar, est-ce que le vignoble alsacien a suscité votre goût pour le vin ?
Mon père, boulanger-pâtissier, aimait beaucoup le vin, bien qu’il n’y connaissait pas grand-chose. Cependant, j’avais un oncle éloigné, Marcel Mullenbach, qui faisait du vin à Niedermorschwihr dans le Haut-Rhin. Il m’a initié à beaucoup de choses sur la vinification, les cépages alsaciens et la potentialité de vieillissement des différents crus. Grâce à lui, j’ai eu quelques belles cuites car il était très généreux en dégustations [rires]. Je me souviens encore, lorsque j’étais enfant, livrer du pain avec mon père au Domaine Schoffit, situé en périphérie de Colmar. C’est d’ailleurs l’un de mes domaines alsaciens favoris, aux côtés de ceux d’Albert Mann, Marcel Deiss, Albert Boxler et le Domaine Weinbach à Kaysersberg.
Quand avez-vous eu l’idée d’approfondir vos connaissances en vin ?
C’était vers la fin des années 1970, pendant mon apprentissage à Paris chez Lenôtre, un ami et moi avons décidé de suivre des cours du soir à l’Académie du vin. Cette école privée avait été fondée par un expert anglais, Steven Spurrier, qui possédait aussi une boutique réputée, La Cave de la Madeleine. J’ai ensuite acheté des livres pour continuer à me former.
Qu’est-ce qui vous a poussé à vous intéresser au vin ?
Je ne pouvais pas résister à l’attrait du vin, malgré mon ignorance à ce sujet. J’avais cette intuition que pour jouir pleinement de ce nectar, une familiarité avec les variétés de raisins, les terrains qui les hébergent, et les traditions locales serait nécessaire. Ces formations m’ont donné le moyen d’exercer ma dégustation, d’exprimer mes sentiments et m’ont beaucoup soutenu dans mon métier de pâtissier. Dans ce temps-là, nous n’étions pas formés à articuler nos expériences gustatives.
Avez-vous commencé à acquérir du vin très rapidement ?
Oui, en fonction de mes ressources de ce temps-là. Je faisais des concessions. Vers la fin des années 1970, je me suis offert un Château d’Yquem 1968. Une année de production peu renommée, mais quand Yquem produit un vin, c’est qu’il est promis à la qualité. Cela m’a coûté un cinquième de mon revenu. En buvant ce sauternes exceptionnel au parfum de safran avec mon ami, nous avions l’impression de plonger dans un monde nouveau.
Veuillez vous connecter pour lire le reste de cet article. Le contenu suivant est exclusif aux membres abonnés.
Laisser un commentaire