Dans les dernières semaines, le gouvernement a mis en évidence l’administration comme bouc émissaire pour ses propres échecs, en annonçant des réductions budgétaires, des discours critiques à l’égard des hauts responsables et des licenciements dans le secteur public. Cela exacerbe un dangereux affaiblissement de l’État, à l’origine de la situation présente.
« Rendre les licenciements plus faciles dans le secteur public pour insuffisance de performance » et envisager « l’élimination des catégories A, B, et C » : Le ministre de la fonction publique, Stanislas Guerini, a présenté ces mesures comme novatrices mais en réalité, elles ne changeraient pas grand chose.
La capacité de licencier est déjà en place : si le taux de licenciement est faible, c’est probablement à cause d’un manque de leadership efficace au sein de l’Etat plutôt qu’un manque de régulation. Pour ce qui concerne l’élimination des catégories de fonctionnaires A, B et C, le faire sans prévoir une solution alternative pour gérer les carrières ne ferait qu’aggraver la situation actuelle.
Calculs électoraux.
Ces annonces imprévues cachent des intentions électorales. Le parti en place vise à attirer plus d’électeurs, en particulier de l’aile droite, en misant sur la supposée aversion des Français pour l’Etat. Cependant, ce pari est un échec car les mesures proposées sont beaucoup trop complexes pour séduire le grand public. Lorsque les élites technocratiques tentent de jouer la carte du populisme sans aucune connaissance réelle du peuple, le résultat est un impact électoral nul et un risque potentiel de dommages institutionnels. De plus, ce supposé rejet de l’Etat par les Français trouve son origine dans la conviction bien établie que l’Etat fonctionne mal, offrant des services de plus en plus coûteux et de qualité inférieure, une situation que le président actuel, en semblant rejeter la faute sur son administration, a grandement aggravée.
Mais ces annonces sont plus profondes que de simples manœuvres électorales. Elles font partie d’une tendance plus large liée à la vision d’Emmanuel Macron de l’Etat. Contrairement, par exemple, au général de Gaulle ou à Georges Pompidou, qui voyaient l’Etat comme un moyen de gouverner, Emmanuel Macron fait partie d’une génération de politiciens qui perçoivent l’Etat comme un obstacle à réduire, à « ubériser », pour augmenter la marge de manœuvre et la flexibilité.
Dans l’introduction de « L’État en mode start-up » (dirigé par Yann Algan et Thomas Cazenave, Eyrolles, 2016), il a absorbé l’esprit du « new public management » de la décennie 1990. Il a avancé l’idée de transformer l’administration en un système entièrement numérique. Implicitement, il a incité à digitaliser toute fonction possible au sein des services de l’État et à établir des contrats ou privatiser ce qui reste. L’objectif était de réduire la présence terrestre de l’État, anticipant ainsi un surplus d' »agilité » pour les citoyens et les leaders.
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