La Fashion Week de New York a connu son apogée dans les années 2000, mais peine désormais à rivaliser avec les défilés de Paris et Milan. L’absence de nouveaux talents et les créations conventionnelles des grandes marques s’en tiennent à un rôle de figuration. Selon Pierre Rougier, directeur d’un bureau de presse à Paris et à New York, les marques américaines ne sont pas capables d’ exploiter le dynamisme créatif des designers. Le passage éphémère du Belge Raf Simons chez Calvin Klein, qui a abandonné après deux ans de collaboration, en est un exemple.
Toutefois, New York sait toujours attirer les créateurs européens pour une éphémère visite défilée. Ainsi, en avril dernier, la maison Dior a investi le Brooklyn Museum ; Alexander McQueen avait défilé sur les anciens docks de Brooklyn en mars 2022. En septembre 2023, COS, la marque chic et haut de gamme du groupe H&M, avait défilé dans un club de Manhattan, tandis que Ludovic de Saint Sernin, jeune créateur parisien, présentait sa collection sur un gratte-ciel du quartier, en février. Pourquoi est-ce une étape inévitable pour les marques emergentes ou établies, abordables ou haut de gamme?
Ludovic de Saint Sernin se rappelle qu’avoir vu « Le diable s’habille en Prada » en tant qu’adolescent a toujours eu l’envie de travailler dans la mode à New York. Il a eu l’occasion lorsqu’il a élaboré une collection basée sur Robert Mapplethorpe, icône de la scène artistique new-yorkaise des années 80. Lucien Pagès, qui accompagne de nombreux designers, résume que New York reste une ville de rêve pour les créateurs européens, où l’inspiration peut provenir de l’apparition soudaine de Godzilla entre deux bâtiments ou d’un serial killer dans Central Park.
Les défilés, cocktails et dîners sont toujours des incontournables de la scène new-yorkaise. Cela reste à voir si la ville pourra regagner son statut de métropole mode, rivalisant avec Paris et Milan.
Plus qu’une simple référence cinématographique, New York est un fertile terreau culturel pour le secteur du luxe, ajoutant une dimension artistique à ses produits soit par le biais de réouvertures de musées, de lancements d’expositions ou de salons d’art contemporain. Ces événements deviennent des opportunités pour organiser des défilés, des cocktails ou des dîners.
Guillaume Delacroix, qui dirige une agence de relations publiques à Paris et à New York, souligne que New York est avant tout une ville d’affaires. Avec la Chine en proie à une crise économique, le marché américain devient crucial pour les marques de luxe. Ces dernières s’installent à New York, une ville qu’elles comprennent et qui est considérée comme la plus européenne des États-Unis.
Outre son rôle de centre financier et de siège social, New York a aussi un grand nombre de clients fortunés qui apprécient d’être invités à des défilés locaux. Ils sont particulièrement attirés par les événements organisés sur place, une façon pour les marques étrangères de les valoriser, selon M. Rougier.
Ludovic de Saint Sernin voit aussi New York comme une opportunité pour montrer à sa communauté, principalement américaine, sa gratitude. Il se sent bien accueilli tant par ses fans que par les institutions et les médias. Comme le souligne Guillaume Delacroix, un défilé à New York attire l’attention des médias de tout le pays, augmentant considérablement la visibilité. Ce phénomène est encore renforcé par le fait que certains médias, comme le New York Times, sont lus dans le monde entier. De plus, l’écosystème local de la mode est ouvert aux propositions créatives, un aspect moins présent lors de sa propre semaine de la mode.
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