Découvrez tout notre contenu, nos études et nos enquêtes sur le conflit en Ukraine. Des exclusivités du « Monde ». L’instabilité de l’Ukraine, l’hésitation de Washington. La Russie tente de rendre l’Ukraine impotente en attaquant et détruisant ses installations énergétiques. L’itinéraire inhabituel de Stanislav Skrinnik, un danseur de ballet nocturne et producteur d’équipement pour l’armée ukrainienne pendant la journée. Paris 2024 : la division du mouvement sportif russe sur sa participation aux Jeux Olympiques. Pourquoi la flotte de la mer Noire russe est-elle maintenant si vulnérable ? Ukraine : la frustration des proches de militaires après l’élimination de la clause de démobilisation du projet de loi cherchant à recruter de nouvelles troupes. Le décès en détention d’Alexandre Demidenko, un Russe qui aidait les Ukrainiens à rentrer chez eux. En Ukraine, des militaires confrontés aux dangers des applications de rencontres. Quel est l’impact climatique des conflits ? Nos réponses à vos questions courantes. Comment Moscou et Kiev font-ils appel à des drones ?
La bataille des drones entre la Russie et l’Ukraine a escaladé au fil des mois. Un rapport publié en mai 2023 par un centre d’études britannique spécialisé en défense a indiqué que les Ukrainiens perdaient environ 10 000 drones chaque mois sur le terrain de guerre, soit plus de 300 par jour, tandis que l’armée française compte à peine plus de 3 000 drones dans ses réserves.
Les Ukrainiens et les Russes font largement usage de petits VAD (véhicules aériens sans pilote) d’origine civile, abordables et largement disponibles. Ils permettent d’observer le terrain de guerre et de guider les troupes ou les tirs d’artillerie ; certains sont même fabriqués de manière artisanale pour transporter de petites charges explosives, qui sont ensuite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Bien que moins nombreux, les drones-kamikazes ont une importance significative dans la guerre aérienne. Ces Unmanned Aerial Vehicles (UAVs), équipés de charges explosives, sont même utilisés sans cibles prédéfinies. La Russie utilise ses propres drones, les Lancet-3, ainsi que les Shahed-136 iraniens. L’Ukraine, dépourvue d’une flotte militaire notable, défie l’ennemi avec des engins maritimes non pilotés, y compris des petits kayaks télécommandés chargés d’explosifs (450 kg de TNT).
Reconnaissant la valeur stratégique des drones dans le conflit, tant les Ukrainiens que les Russes ont pris des mesures pour assurer un approvisionnement durable pour leurs forces, en achetant en gros des drones civils sur le marché et en développant leur propre capacité de production. L’industrie ukrainienne, qui en était à ses balbutiements au début de la guerre du Donbass il y a dix ans, s’est depuis intensifiée. Fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé une réplique du drone Lancet russe, bientôt lancée sous le nom de Peroun, du nom du dieu slave de la foudre et du tonnerre.
La Russie, handicapée par les sanctions occidentales qui limitent son accès aux composants électroniques, a du mal à suivre le même rythme. Cependant, selon l’intelligence américaine, Moscou aurait débuté la construction d’une usine dans la zone économique spéciale d’Alabuga, pour produire des drones kamikazes de conception iranienne, comme les Shahed-136.
Quant à l’état actuel des stocks de missiles russes, les données sont difficiles, voire impossibles, à obtenir. Les services de renseignement ukrainiens fournissent régulièrement des informations à ce sujet, mais leurs estimations sont sujettes à discussion.
Andri Ioussov, responsable des renseignements au ministère de la défense (GUR), a rapporté via Liga.net que l’armée russe avait en sa possession 2 300 missiles balistiques ou de croisière avant la guerre, et ce nombre s’était réduit à plus de 900 au début de l’année. En plus de ce chiffre, le porte-parole a ajouté qu’il y avait également environ dix mille missiles antiaériens S-300, qui ont une portée d’environ 120 kilomètres, et une quantité significative de S-400, une version plus récente ayant une portée trois fois plus grande. Vadym Skibitsky, le numéro deux du GUR, a indiqué en août que le nombre de missiles avec une portée supérieure à 500 kilomètres était de 585.
Quant à la production, elle serait estimée à environ une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, d’après plusieurs experts. En octobre, le GUR estimait cette production à 115 unités. Il a également été rapporté que la Russie a acquis des missiles de courte portée en Iran et en Corée du Nord et continue de le faire. Plusieurs sources iraniennes citées par Reuters affirment que 400 missiles iraniens de la famille Fateh-110 (300 à 700 kilomètres) ont été livrés à la Russie depuis janvier, date à laquelle un accord aurait été conclu. On ne sait pas combien de missiles nord-coréens la Russie a acquis, mais 24 ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. Selon les experts qui ont analysé les restes et les trajectoires, il s’agirait probablement des missiles de type KN-23 et KN-24 ayant une portée d’environ 400 kilomètres.
Concernant les avions de chasse F-16, aucune information n’a été mentionnée.
En août 2023, suite à la demande du président ukrainien, les États-Unis ont consenti à transférer des avions de combat F-16 à l’Ukraine. Bien qu’il y ait plus de 300 F-16 répartis dans neuf pays européens, tels que la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, tous ces pays ne peuvent pas céder leurs avions instantanément.
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, avait mentionné le chiffre de 42 F-16 promis par les alliés occidentaux à Kiev, cependant, cette information n’a pas été vérifiée. Selon la première ministre danoise, Mette Frederiksen, le Danemark a promis 19 avions, avec les six premiers devant être livrés à la fin de 2023, huit autres en 2024 et cinq en 2025. Les Pays-Bas, qui ont également promis des avions, possèdent 42 unités, mais n’ont pas déclaré combien ils prévoient de céder.
En plus de cela, les pilotes ukrainiens auront besoin d’une formation spécifique pour piloter ces avions de combat américains. Onze pays alliés de Kiev se sont engagés à former ces pilotes. Selon l’OTAN, les soldats ukrainiens ne seront prêts à utiliser ces avions dans des situations de combat qu’au début de 2024, tandis que d’autres experts estiment que cela pourrait être lors de l’été de la même année.
La question demeure : quels supports militaires ses alliés fournissent-ils à Kiev ?
Deux ans après le déclenchement de la guerre à grande échelle, l’élan d’assistance occidentale vers Kiev ralentit. Le rapport publié en février 2024 par l’Institut Kiel révèle que les soutiens nouvellement engagés entre août 2023 et janvier 2024 ont diminué par rapport à la même période de l’année précédente. Cette tendance est susceptible de se poursuivre, car le Sénat américain peine à approuver de nouveaux soutiens et l’Union européenne (UE) a eu du mal à adopter une aide de 50 milliards le 1er février 2024, à cause de l’obstruction de la Hongrie. Ces deux dernières contributions d’aide ne figurent pas encore dans le récent bilan de l’Institut Kiel qui s’arrête en janvier 2024.
L’analyse de l’institut allemand révèle une diminution du nombre de donateurs, qui se recentre autour d’un ensemble de pays : les Etats-Unis, l’Allemagne et les pays du nord et de l’est de l’Europe. Ces pays assurent à la fois un soutien financier important et des armements de pointe. Depuis le début du conflit en février 2022, les pays en soutien à Kiev ont promis d’apporter au moins 276 milliards d’euros sous forme d’assistance militaire, financière ou humanitaire.
En termes absolus, les pays les plus riches se sont avérés plus généreux. Les Etats-Unis ont été les principaux contributeurs, annonçant plus de 75 milliards d’euros d’aide, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les pays de l’UE ont annoncé à la fois des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides communes par le biais des fonds de l’UE (93,25 milliards d’euros), pour un total de 158,1 milliards d’euros.
Si l’on considère ces contributions par rapport au produit intérieur brut (PIB) de chacun des pays donateurs, le classement fluctue. Les États-Unis chutent alors à la vingtième position (0,32 % de leur PIB), bien après certains pays proches de l’Ukraine ou d’anciennes républiques soviétiques alliées. L’Estonie occupe la première place en termes de dons par rapport au PIB avec 3,55 %, suivie du Danemark (2,41 %) et de la Norvège (1,72 %). Les quatrième et cinquième places sont occupées par la Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %). Les trois États baltes, tous voisins de la Russie ou de son alliée la Biélorussie, figurent parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.
Dans le classement en fonction du pourcentage du PIB, la France se trouve à la vingt-septième place, ayant engagé seulement 0,07 % de son PIB, juste après la Grèce (0,09 %). L’assistance accordée par la France a continué à diminuer depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – elle était vingt-quatrième en avril 2023 et treizième au cours de l’été 2022.
Que savons-nous des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne ?
Les tensions entre la Pologne et l’Ukraine concernant le transit des céréales ont persisté depuis plusieurs mois. Au printemps de 2022, la Commission européenne avait instauré des « routes de solidarité » pour aider à la distribution et à la vente de produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient, exemptant des frais de douane. Cependant, des études de la Fondation Farm, un groupe de réflexion en agriculture mondiale, indiquent que près de la moitié des céréales ukrainiennes passent ou terminent leur voyage dans l’Union européenne (UE). Ces céréales sont vendues à des prix bien inférieurs à celui du blé produit en UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.
Des pays tels que la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont donc décidé en avril 2023 de bloquer leurs importations, arguant que ces céréales perturbent leur marché local et les revenus de leurs agriculteurs. Bruxelles était d’accord à condition que cela n’entrave pas le transit vers d’autres pays et que cela ne durait que quatre mois. Cependant, la Pologne a choisi de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été, arguant que le problème sous-jacent n’avait pas été résolu, malgré Bruxelles affirmant que l’embargo n’avait plus lieu d’être car leurs analyses démontraient « qu’il n’y avait plus de distorsion des marchés nationaux de céréales ».
Des agriculteurs en Pologne ont mis en place un blocus à la frontière ukraino-polonaise pour interdire l’accès des camions ukrainiens sur le sol national. Ils exigent une interdiction totale des marchandises agricoles et alimentaires en provenance de l’Ukraine. Ils se plaignent de l’augmentation de leurs dépenses de production alors que les silos et les entrepôts sont remplis à capacité et que les prix sont extrêmement bas. Au début de 2024, le président ukrainien a exprimé son point de vue selon lequel le blocus représentait une « diminution de la solidarité » envers son pays et a demandé des discussions avec la Pologne. Il a également déclaré que seul Moscou se réjouissait de ces conflits, dénonçant l’émergence de slogans clairement en faveur de Poutine.
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