La photographie montre un homme dans un blouson noir, assis sur un scooter électrique bleu, qui semble patrouiller devant un bâtiment. Celui qui a capturé l’image est un garçon de 13 ans qui a également photographié d’autres personnes habillées de noir qui l’ont suivi ces derniers temps. Sa mère, Keke (un pseudonyme), âgée de 48 ans, a partagé les photos avec Le Monde. Elle s’interroge : « Son frère aîné est déjà derrière les barreaux, mais pourquoi cibler un garçon de 13 ans ? ». Keke comprend que le harcèlement de son fils est une tentative de les intimider, elle et son mari, pour qu’ils cessent de se battre pour leur fils ainé, qui a été condamné à 14 ans de prison en 2020 pour « incitation au désordre » et « atteinte à la vie privée d’un tiers ». Niu Tengyu a été accusé de travailler pour un site Internet qui a divulgué des informations sur la fille du Président chinois, Xi Jinping.
Keke considère son fils comme un bouc émissaire payant pour les fondateurs du site qui vivent tous à l’étranger. Depuis quatre ans, Keke est victime des abus de l’État policier chinois. Elle subit régulièrement des menaces de mort, de la diffamation auprès de ses amis, elle est empêchée de gagner son salaire et même de dormir : un bruit aigu retentit chez elle chaque nuit. Elle raconte tout cela depuis le Henan (Centre de la Chine) où elle vit. Son mari a été emprisonné pendant quelques semaines début 2024 pour avoir tenté de visiter leur fils détenu au Guangdong (Sud-Est de la Chine).
Les parents de Niu Tengyu, bien qu’ils soient dans une situation extrême, ne sont pas les seuls à faire face à ce genre d’épreuve dans le pays. Leur situation est une parmi plusieurs présentée dans un rapport intitulé « Si je désobéis, ma famille va souffrir », publié par les Défenseurs des Droits Humains Chinois (CHRD), une alliance d’organisations consacrées à la protection des droits de l’homme.
« Punitions de groupe »
Cette ONG, basée à Washington, a énuméré plusieurs attaques perpétrés contre des défenseurs des droits humains pendant toute l’année 2023. « Les autorités chinoises infligent des peines collectives aux familles des défenseurs des droits de l’homme, y compris aux enfants en bas âge. Ces punitions, bien qu’elles soient illégales, ont un impact terrible sur les résidents de la Chine continentale et ceux situés en dehors du pays. Ces actes de punition de groupe sont contraires au droit international », affirme CHRD.
Les conduites mentionnées ne sont pas des phénomènes récents, mais ce qui fait particulièrement l’importance de ce rapport, c’est son axe sur l’année 2023, malgré le fait que la majorité des activistes mentionnés dans cet exposé de vingt-quatre pages aient été reconnus coupables et libérés plusieurs années avant. « Depuis plusieurs décennies, les autorités chinoises recourent à ces méthodes, causant d’énormes dégâts en toute impunité. Le simple fait de chercher à obtenir justice provoque souvent davantage d’intimidation de la police, de violence et de poursuites injustifiées », souligne le rapport.
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